La défense des droits de la femme vu par Virginia Woolf
08/03/2012
Comme chaque 8 mars, chers lecteurs et amis, nous marquons aujourd'hui d'une pierre une énième Journée internationale des droits des femmes (oui, "les droits des femmes" et non pas juste "la femme", on est pas en train de commémorer jalousement le fait qu'on a des nichons et qu'on aime se faire offrir des fleurs - pour ça, y a la Saint Valentin si besoin). A cette occasion, notre consoeur bloggeuse Sophie nous propose d'en profiter pour mettre à l'honneur un auteur féminin et son oeuvre et je ne peux que me rallier à cette excellente idée ! Merci Sophie !
Mon choix se porte évidemment sur l'extraordinaire Virginia Woolf (Vous remarquerez comme je fais preuve d'une désopilante originalité puisque je ne lui porte AUCUNE admiration hein), non seulement écrivain géniale mais aussi fervente defenseuse des droits des femmes dans une société anglaise encore bien rigide.
Virginia Woolf vient au monde en 1882 dans une famille typiquement victorienne et (mais je pourrais aussi mettre "donc") typiquement patriarcale. Son père Leslie Stephen était de ces intellectuels érudits à plusieurs casquettes et sa mère Julia, une parfaite mère de famille occupée, en outre, à aider quelques familles dans le besoin. Cette dernière était une fervente opposante au mouvement des suffragettes ; la place des femmes, d'après elle, n'était pas dans la rue à se pavaner. Concernant la fratrie liée par une belle entente, les deux frères Toby et Adrian iront à l'université tandis qu'elle-même et sa soeur Vanessa seront privées de cette opportunité, se forgeant leur propre éducation à domicile au gré de leurs envies et de leurs accointances - l'art pour Vanessa et la littérature pour Virginia.
Je vous le disais donc, une famille typiquement victorienne.
Cela étant dit, ne soyons pas mesquins : Virginia Woolf connaitra une jeunesse plutôt privilégiée du point de vue de la culture et des moyens financiers. La fratrie devenue orpheline rassemblera un petit groupe de passionnés d'arts et lettres à leur nouveau domicile de Bloomsbury et cela marquera l'épanouissement de la personnalité et de l'écriture de Virginia Woolf.
Dès lors, Virginia Woolf n'aura de cesse d'écrire en faveur d'une véritable autonomie et d'une culture féminine. Elle n'était pas féministe au sens contemporain du terme ; il n'était pas question de réclamer une égalité stricto sensu entre hommes et femmes. Elle souhaitait par contre que les femmes puissent accéder à une liberté d'être, à la possibilité de choisir une vie qui leur serait propre, en adéquation avec leurs dispositions et leurs talents particuliers. C'est ce qu'elle a défendu dans un certains nombres de conférences, de cours et d'essais. Dans l'Angleterre engoncée du début du XXe siècle, la femme était cantonnée aux travaux domestiques, pourtant affirme-t-elle, elle ne nourrit pas plus d'intérêt pour cet emploi que l'homme. Sans aucun espace privé à l'intérieur de son domicile tandis que le mari avait son bureau, l'entier de la maison était le territoire de la femme sans l'être du tout. Virginia Woolf milite donc en faveur d'une chambre à soi, d'un espace privé pour la femme, où elle aurait le temps et le loisir de laisser libre cours à ses aspirations, tout aussi diverses et avec autant de compétences que son acolyte à couilles (puisque le cas des femmes célibataires n'était pas vraiment répandu à l'époque)
Loin d'agiter un féminisme de carnaval (comme je déplore de le voir de plus en plus aujourd'hui), Virginia Woolf fustige l'oppression des institutions patriarcales (qu'elle comparera à l'oppression nazie dans Trois Guinées) et a fait une vertu de la liberté de penser, quel que soit son sexe (parce qu'elle était pas misandre non plus hein).
Pour aller plus loin sur le sujet dans son oeuvre :
Une chambre à soi (1929), ed. 10/18, 6€ ou ed. Rivages payot, 7€ (avec la traduction du titre Une pièce bien à soi)
Trois guinées (1938), ed. 10/18 (actuellement plus édité visiblement, c'est honteux) MAIS future nouvelle édition aux editions BlackJack dans une nouvelle tradition à partir du 20 mars 2012.
La force du féminin : sur trois essais de Woolf de Frédéric Regard, ed. La Fabrique, 2002
"Les difficultés matérielles auxquelles les femmes se heurtaient étaient terribles ; mais bien pires étaient pour elles les difficultés immatérielles. L'indifférence du monde que Keats et Flaubert et d'autres hommes de génie ont trouvée dure à supporter était, lorsqu'il s'agissait de femmes, non pas de l'indifférence, mais de l'hostilité. Le monde ne leur disait pas ce qu'il disait aux hommes : écrivez si vous le voulez, je m'en moque...Le monde leur disait avec un éclat de rire : Ecrire ? Pourquoi écririez-vous ?"
dans Une chambre à soi
Tous les autres billets littérairement féminins sont listés ici chez Sophie
Bonne lecture !
11 commentaires
Voici un bel hommage, je ne connais pas vraiment l’œuvre de Virginia Wolf, mais elle est dans mon cœur de femme au même titre que Colette, George sand et toutes celles qui ont contribué à cette lutte pour une égalité des droits. J'ai acheté "Une chambre à soi" pour le lire pendant l'été, c'est pour moi une lacune de ne pas avoir lu ce livre. Je trouve vraiment bien de faire le relais sur les blog de cette journée, il y a encore trop de femmes soumises aux dictats des hommes dans beaucoup de pays et chez nous, ce n'est qu'en apparence que tout va bien : femmes battues, inégalités dans le travail, tâches domestiques..... Il y a encore beaucoup de trop de femmes dont le quotidien est pénible parce qu'elles sont des femmes.
En l'honneur de ce 8 mars, je te souhaite une belle journée, à bientôt
Figure-toi que je n'ai pas encore lu "Une chambre à soi" non plus mais chuuuut, faut pas le dire !
A mon sens, le plus passionnant de l’œuvre de Woolf n'est pas dans ses écrits féministes cela dit, même s'ils sont important pour ce qu'ils prônent, mais dans ses romans. Pour la simple et bonne raison qu'elle a un talent hallucinant et qu'elle offre une vision de la vie immensément riche de sens et de sensations. Du coup, si tu ne l'as jamais lue, je te conseille "Mrs Dalloway", "La Promenade au phare" ou "Les Vagues". Tu verras que chacun de ses ouvrages fait d'ailleurs la part belle aux personnalités féminines :)
A bientôt Nina¨¨**
Je ne connais pas ses oeuvres non plus, ce billet m'a permis de la découvrir. J'aime bien sin idée du féminisme. Bonne journée à toi
J'espère que ses œuvres te plairont si tu décides d'aller y goûter :)
A bientôt !
Merci pour cette belle découverte !
Merci à toi pour l'initiative ;)
Article très intéressant, merci! j'ai choisi de rappeler sur mon blog qqs dates essentielles pour le combat des femmes...et pour qu'il continue! Sophie (encore une!)
Je viens d'aller voir ton blog. Merci pour cette piqûre de rappel !
Un beau billet bien documenté qui présente bien les engagements de Virginia Woolf.
Petit message hors-sujet : je ne trouve pas ton adresse email pour pouvoir t'envoyer le questionnaire du swap victorien (peut-être que je n'ai pas assez cherché sur ton blog...) ; pourrais-tu me l'envoyer à helene.laug@gmail.com s'il te plait ?
Merci
Bises
Léna
Passionnant je n'ai rien lu d'elle, est-ce la femme qui avait décidé de se suicider avec son mari avant la seconde guerre mondiale ou la premiere. En fait lol j'en sais rien du tout et qui finalement s'est suicidé pour rien parce que l'armistice a été signé et qu'elle avait les pétoches que les nazis envahissent l'Angleterre. Ou alors lol je fabule, je sais plus franchement. Ah ma cuture présente encore quelques lacunes je crois. Oups va falloir y remédier.
En tout cas c'est une très bonne idée cettre rubrique, si je n'étais pas aussi lente à écrire des billets j'y aurai volontier participer.
Bises
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