Voler! du moine JAEYEON
20/06/2013
Voler! du moine JAEYEON et illustré par Kim Sehyeon, traduit du coréen par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel, éditions Philippe Pïcquier, 2009, 156p.
Voler! est de ces paraboles initiatiques pleines de lumière dont les spiritualités du monde entier ont le secret.
Pilou est un jeune caneton d'élevage. Chaque midi, il part s'ébrouer à la rivière au son clinquant d'une boîte de conserve et il rentre de même le soir avec sa tribu docile. Pilou et les siens ne savent pas voler et se contentent de vivre cerclés d'une haie. Pourtant, Pilou rêve de s'élever dans les airs. Il n'y a aucune raison utilitaire à cela puisqu'il est déjà nourri et est dans une vie confortable bien que recluse. Il veut voler, simplement, comme ces canards sauvages qu'il voit migrer. Tel est le rêve fou de Pilou.
Afin de le réaliser, il s'échappe un jour de son élevage. Oh, ce n'est pas difficile puisqu'aucune barrière n'empêche la sortie ! Mais dès lors que sont loin les entraves rassurantes de la captivité commence une vie faite d'errance, de solitude et de questionnements pour cheminer vers son rêve. Au fil de ses pérégrinations, Pilou va croiser plusieurs personnages étonnants qui, chacun à leur manière, vont le guider sur la voie de l'envol jusqu'à ce qu'enfin, il puisse revenir vers les siens à travers ciel.
Vous l'aurez compris, Pilou, c'est le rêveur en chacun de nous. Bien souvent nous l'oublions et nous devenons comme ce vieux canard qui a trouvé la voie de la sérénité en faisant le deuil de ses aspirations profondes. Parfois, nous croisons aussi des esprits dogmatiques et froids qui nous imposent une foi qui n'est pas la nôtre, comme ce vieux héron qui veut imposer son savoir au lieu de le laisser fleurir dans le coeur de l'élève.
Mais Pilou nous rappelle que les rêves sont ce qui nous consituent, ce qui nous fait avancer et l'auteur profite de ce cheminement en la forêt de l'être pour incarner plusieurs grands principes bouddhistes : la méditation, la concentration, l'ascétisme, la solitude, la persévérance, la liberté et bien sûr l'amour. Le chemin de sa propre réalisation n'est pas un parcours de santé, d'après le moine Jaeyeon. Les embûches et parfois la souffrance sont nécessaires. Elles affinent, aiguisent et recentrent. Mais ce n'est pas que cela non plus car l'être apprend à s'ouvrir à chaque particularité du monde et développe une profonde acuité - comme Pilou peut sentir chacun de ses vaisseaux sanguins lorsqu'il bat des ailes.
Ceux qui me connaissent savent que j'ai quelques accointances avec les spiritualités asiatiques, aussi j'étais une lectrice plutôt conquise d'emblée par le propos du joli récit que voilà. Il y a beaucoup de vrai dans cette quête de soi au-delà des chaînes de la société. J'ai néanmoins toujours un peu de mal avec ce ressassement de l'ascétisme nécessaire ici un peu trop appuyé à mon goût. Ce n'est certes pas complètement faux mais, si la solitude et les entraves sont toujours l'occasion d'un enseignement fructueux s'ils se présentent, ils ne me semblent pas pour autant primordiaux pour cheminer. Et quand bien même ce serait le cas, je préfère aller moins loin dans la joie que peiner comme un pauvre diable tout seul en haut de ma montagne de sagesse.
Malgré ce petit bémol, Voler! est un conte délicat qui fera une très belle introduction à qui veut s'initier à la sagesse bouddhiste ou à qui veut entamer une marche intérieure.
Bonne route - ou devrais-je dire, bon vol !
Oiseaux de Judit Reigl, encre de chine, 2011
Lu en lecture commune avec Coccinelle pour clore en beauté son printemps coréen
C'est par ici pour voir son billet !
6 commentaires
Bonjour Lili, merci pour ce beau billet ! (je vais rajouter ton lien). Je suis contente que cette lecture t'ait plu, même si nous sommes bien conscientes toutes les deux que tous ne peuvent / veulent pas devenir des ascètes. Je pense qu'il y a quand même des choses à conquérir, le bonheur, notre rêve, parce que tout ne nous est pas dû. Et ce livre, très joliment illustré, a comme tu le dis de belles qualités. Merci d'avoir participé à cette lecture commune, Lili, merci d'avoir participé au Printemps coréen (je suis un peu triste qu'il se termine, je vais faire un bilan). Bonne fin de semaine et bon weekend.
Merci à toi de me l'avoir conseillé lors du dernier tag :) Ce fut une belle découverte et j'en ai savouré la lecture !
Coucou! Cela a l'air d'être un joli conte. Je connais peu la pensée Boudhiste mais j'aimerais lire Sidharta d'Herman Hesse à ce sujet. Sympa cette LC. Bisous
Le roman d'Hesse a l'air passionnant, je le lirai bien moi aussi, tiens !
Gros bisouxx Missy !
J'adore l'idée et la couverture mais j'ai souvent du mal avec les paraboles :-/
Hmmm disons qu'il ne faut que que ce soit trop long. Celle-ci se lit bien, assez rapidement, donc on a pas le temps de s'en lasser. Perso, je l'ai lu un matin de week-end en un petit déj :)
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