Mauvais genre de Chloé Cruchaudet
19/04/2014
Mauvais genre de Chloé Cruchaudet, Delcourt, 2013, 160p.
Fauve d'Angoulême 2014 - Prix du Public Cultura
La couverture de Mauvais genre a l'avantage de laisser l'imagination gambader à loisir quant au contenu de l'histoire. Et, avouons-le, on a tendance à imaginer une histoire de lesbiennes à peu près de nos jours. C'est donc avec un certain étonnement - et un étonnement ravi, c'est le meilleur des signes - que j'ai découvert une histoire d'amour naissante entre Paul et Louise peu avant la première guerre mondiale. Dès le mariage, Paul part au service militaire immédiatement suivi du front. L'horreur de la guerre ne tarde pas à lui faire grimper une araignée au plafond ; il choisit donc de déserter. Mieux vaut se cacher que mourir déchiqueter et voir des morts partout. Au fil du temps, la planque prend néanmoins un goût amer de prison injuste. Les amoureux trouvent une solution pour permettre à Paul de remettre le nez dehors en attendant l'amnistie des déserteurs : devenir une femme. Si le costume n'est au début qu'un truchement pour tromper la loi, il devient rapidement une seconde peau pour Paul qui campe une femme particulièrement libérée plus vraie que nature.
Soyons francs et brefs : j'ai adoré cette BD ! Il fallait bien ça pour que je la chronique d'ailleurs, puisque j'ai la chronique de BD flemmarde en ce moment. Lorsqu'une amie a proposé de me la prêter, j'étais a priori peu enthousiaste - rapport à la couverture qui m'évoquait une histoire de lesbiennes de nos jours, sujet qui ne m'attire pas franchement. Elle m'a néanmoins appâtée en me disant que ça n'avait rien à voir avec ce que je pouvais imaginer. Tiens, tiens... Et de fait, l'histoire n'a non seulement rien à voir mais est absolument passionnante, d'autant qu'elle est inspirée d'une histoire vraie. Les personnages sont complexes, drôles et torturés, d'une profondeur parfaitement humaine qu'il est agréable de retrouver avec tant de pertinence. L'ambiance début de siècle et plus précisément le vent d'émancipation voire de douce folie qui plane au sortir de la première guerre mondiale est merveilleusement croquée, de même que les troubles d'anciens combattants. Tout cela se mêle habilement à travers le flot d'un scénario tout en flashback et un graphisme tantôt piquant tantôt brûlant. Tu m'étonnes que ce titre a reçu le prix du public au dernier festival d'Angoulême : c'est amplement mérité !
Je sais qu'il a déjà pas mal fait le tour de la blogo ; je m'ajoute donc à une longue file de blogueurs et blogueuses enthousiastes pour vous conseiller de vous plonger dans Mauvais genre un soir sous la couette. A lire d'un trait, avec le sourire - parfois un sourire un peu triste, mais le sourire quand même, pour finir par vous dire que la BD française a décidément un sacré bel avenir.
Challenge Mélange des genres chez Miss Léo
Catégorie BD
8 commentaires
Déjà dans ma PAL. Il me reste à la lire mais pour le moment, je ne suis pas très BD.
Je ne suis pas très BD non plus en ce moment pourtant, tiens, mais l'occasion du prêt a fait le larron en ce qui me concerne. Hmm, l'envie BD reviendra sans doute plus tard !
Ca, ce sera ma prochaine BD! Sans faute. C'est tellement tentant!
Et c'est encore plus tentant qu'on on l'attaque ^^
Je viens de dévorer cette BD. Exactement comme tu le notes, d'une seule traite sous la couette! Et effectivement elle nous conduit beaucoup plus loin que ce que laissait penser la couverture ou le résumé. Une très belle réussite!
Nous avons eu une même expérience et un même ressenti de lecture, Fransoaz ! Une très belle réussite, en effet !
Un soir sous la couette, je ne sais pas. Cette BD m'a vraiment mise mal à l'aise, et une amie à qui je l'ai prêtée a mis un après-midi à s'en remettre.
Mais tu as raison, c'est vraiment une oeuvre de très grande qualité.
Tu as raison Lilly, le sujet est difficile et surprenant, il ne laisse clairement pas indifférent.
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