Gatsby le Magnifique de Francis Scott Fitzgerald
15/05/2013
Gatsby le Magnifique de Francis Scott Fitzgerald, ed. Le Livre de Poche, 1925, 203p.
Dans la banlieue New-Yorkaise des années folles, de modestes bicoques côtoient de fastueuses demeures. C'est ainsi qu'à West Egg, Nick Carraway habite en face de Jay Gatsby et le rencontre lors d'une soirée où tout est outrance. Le champagne, la musique, le monde - tout coule à flot. Nick Carraway est à la fois impressionné et incrédule face à son hôte qui n'a rien d'un vieil homme d'affaires grisonnant. Gatsby est un trentenaire au visage poupon dont le sourire rassure instantanément. Mais surtout, Gatsby est nimbé d'un mystère qui attire : a-t-il tué un homme ? A-t-il étudié à Oxford ? D'où vient-il et qui est-il ? Face à toute une floppée de fêtards et d'inconstants, Nick est le seul à s'intéresser vraiment à son hôte et voisin sans pour autant l'idéaliser.
Rapidement, Gatsby demande à Nick de l'aider à réaliser un rêve qu'il nourrit depuis cinq ans : reconquérir son véritable amour, Daisy, la cousine de notre narrateur. Ce dernier accepte de jouer l'entremetteur de leurs retrouvailles avant d'assister, impuissant, à la déliquescence de cette relation et de Gatsby lui-même. Car Gatsby se tenait en équilibre sur ce fantasme entretenu. C'est à ce seul but qu'il a voué sa vie d'opulence et de fastes. Tout s'arrête, dès lors, en même temps que l'espoir de son amour et la descente est aussi brusque et tragique que le présageait son désir fou.
J'ai lu ce livre il y a une dizaine d'années, après Tendre est la nuit que j'avais adoré. J'ai été un peu déçue par ce monument de la littérature américaine, en tout cas je l'ai trouvé moins bien que le précédent lu du même auteur. Mais lorsque Adalana a proposé de (re)lire cet opus en lecture commune à l'occasion de son adaptation ciné par Baz Luhrmann, j'ai tout de suite sauté sur l'occasion : je sentais bien, au fond, que j'étais un peu passée à côté la première fois.
Et je le confirme : cette relecture a été un vrai plaisir et une redécouverte totale ! Gatsby le Magnifique est définitivement un excellent roman !
Bien sûr, il est un instantané flamboyant de son époque. Le début du chapitre III décrit abondamment les fêtes du protagoniste comme un déploiement de tout ce qu'il peut y avoir de plus grandiloquent. Transparaissent à la fois l'atmosphère des soirées recherchées par la jeunesse qui aspire à s'oublier et, en filigrane, la situation économique d'où émergent nombre de "nouveaux riches" plus ou moins frauduleux. Gatsby n'échappe pas à cette condition. Il n'est pas présenté comme quelqu'un de spécialement raffiné ; il veut bien plutôt que se voit sa richesse car c'est ce qui séduira Daisy, parfaitement vénale. Gatsby le Magnifique, comme les autres romans de Fitzgerald (du moins, ceux que j'ai lus) offre un regard sans concession, désenchanté et finalement, plutôt sombre sur l'Amérique début de siècle.
Mais tandis que j'avais essentiellement retenu cet aspect du roman, j'en ai découvert d'autres. Tout d'abord, le profond romantisme de Gatsby. Dans le désenchantement général, Gatsby est un personnage qui aime secrètement la même femme depuis cinq ans et qui a oeuvré durant tout ce temps dans le seul et unique but de l'atteindre à nouveau. C'est tout de même faire preuve d'une constance étonnante en pleine période du mouvement perpétuel ! Ce qui aurait pu n'être qu'une gentille mièvrerie apparait au sein de Gatsby comme une dichotomie dangereuse : à la fois archétype de son siècle, il en est en même temps son opposé total, habité d'absolu. Cette dualité lui sera fatale.
Et puis, j'ai constaté cette fois l'intelligence d'écriture de Fitzgerald. Il vogue de rebondissements en rebondissements. S'enchaînent les épisodes qui font progresser la narration vers une noirceur de plus en plus grande et l'on sent rapidement que la fin de Gatsby est inéluctable. C'est un tissage tragique parfaitement mené.
J'avais déjà envie de voir l'adaptation de Lurhmann (parce que la bande-annonce m'inspirait et parce que j'ai un faible pour DiCaprio, j'avoue, j'avoue) mais alors là, c'est une évidence : s'il passe dans mon bled paumé, je ne le raterai pas ! Je suis persuadée, en plus, que les scènes de soirées se prêtent merveilleusement au style cinématographique du réalisateur. Reste à espérer qu'il n'aura pas retenu que ça et qu'il n'aura pas limiter l'histoire à une succession de jolies cartes postales.
Lu dans le cadre d'une lecture commune avec Adalana, Miss Léo, Shelbylee et pleins d'autres !
Et hop, par la même occasion, j'attaque le challenge de Bianca sur les 100 livres à avoir lu !
Challenge Fitzgerald et contemporains chez Asphodèle
2eme lecture
18 commentaires
Coucou Lili,
Très beau billet, tu as dit tout ce qui fait le sel de ce roman envoûtant et mystérieux, si je ne venais pas de le lire, tu m'aurais convaincu de le faire ! Lecture prise en compte pour le challenge !
Merci Bianca !
Pour moi, ça été une excellente relecture !
J'ai Tendre est la nuit dans ma PAL alors je commencerai plutôt par celui-ci. Mais il est évident que je lirai aussi Gatsby le magnifique !! :)
Très bonne chronique encore :D
Bisous Lili :)
Ahhh, j'ai un merveilleux souvenir de "Tendre est la nuit". Je projette de le relire bientôt aussi mais il faut d'abord que je le rachète. J'espère qu'il te plaira !
Magnifique billet ! Comme toi, j'ai été frappée par le côté romantique de l'histoire auquel je ne m'attendais pas du tout. (Quelle garce cette Daisy !). Je compte rapidement poursuivre ma découverte de Fitzgerald.
Oui, Daisy est une vraie garce grrrrr !
J'espère que le reste de l'oeuvre de Fitzgerald te plaira autant !
Très beau billet et belle plume.
J'ai très envie de lire d'autres romans de Fitzgerald.
Merci Noctembule !
Je ne peux que t'encourager à découvrir plus cet auteur !
Je me souviens vaguement du film...
Bonne fin de semaine.
Je n'ai pas vu l'adaptation avec Redford pour ma part :)
Comme toi j'aime le sentimentalisme de Gatsby, car tous les autres personnages, à part le narrateur, semblent ne rien ressentir d'authentique. Tu as raison aussi quand tu dis que ça aurait pu être mièvre. C'est vrai qu'avec cette histoire qui tient du fait divers, le roman aurait pu être tellement moins qu'il n'est. Peur-être que c'est ce qui nous épate dans ce roman, le fait que Fitzgerald a écrit un roman extraordinaire à partir d'une histoire qui ne l'est pas tant que ça. Bon, maintenant je crois qu'il va falloir que je lise Tendre est la nuit...
Oui, je te rejoins totalement, Virgule !! Le roman aurait pu être beaucoup moins et pourtant, Fitzgerald en a fait un très grand roman. C'est ce qu'on appelle le talent ^^
J'avoue que j'étais aussi passée un peu à côté de ce roman, lu il y a très longtemps, sauf de la deuxième partie et surtout de la fin !!!! Mais bon, j'ai Tendre est la nuit dans ma PAL.
Le film, en revanche, ne me tente pas du tout et en plus, j'ai entendu que c'était assez peu respecté, notamment du point de vue de la relation entre Daisy et Gatsby.
Ouuuh mais je sens qu'on va s'organiser une petite LC de Tendre est la nuit, avec tous les motivés pour le lire ;;)
Quant au film, hmm... Je crains un peu la mauvaise adaptation (le style de Luhrmann est vraiment intéressant mais le danger, c'est qu'il devienne superficiel) mais j'irai le voir quand même !
Mais quel beau billet, je l'ai lu déjà deux fois, Fitzgerald transcende la vanité des existences futiles en autre chose de grandiose, comme tu le dis, c'est ça le talent ! Tu sais que j'ai un challenge Fitzgerald en cours, si tu veux t'inscrire tu es la bienvenue (mais pas d'obligations !) :D
Super pour le challenge ! La relecture de "Tendre est la nuit" rentrera pile poil dedans !
Je suis partante pour la LC :-)
Super ! Je publie une proposition de date mercredi justement !
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