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19/04/2016

Elle, par bonheur, et toujours nue de Guy Goffette

Elle, par bonheur, et toujours nue.jpg

Elle, par bonheur, et toujours nue de Guy Goffette, Gallimard, coll. L'un et l'autre, 1998, 150p.

 

Bonnard Le vase de fleurs.jpgLe récit de Guy Goffette naît d'une rencontre fortuite un jour de pluie, au détour d'un musée d'art. Rencontre avec la peinture de Pierre Bonnard et rencontre avec une femme aussitôt vue, aussitôt aimée - miroir de Marthe, muse et femme du peintre. Et puisque chaque artiste évolue au gré de cette fameuse inspiration faite chair, peau et amour, c'est au fil de la figure de Marthe - la rencontre, la vie commune, la lente glissade vers l'habitude, la maladie, la mort - que Goffette brosse le portrait de ce peintre impressionniste qui restera toujours fidèle à la lumière et à la couleur malgré l'émergence d'autres courants picturaux au début du XXème siècle.

Les nus sont pareils, qui masquent la nudité, dérobent le frémissement de la chair sous la peau, gomment le temps qui passe. Et celle que Pierre va peindre désormais ne vieillira plus. p. 114

Grâce à Goffette, je découvre Bonnard, qui ne faisait partie de mon imaginaire artistique que de nom. Une méconnaissance qui semble générale en France pour ce peintre mort au milieu du XXème siècle tandis que l'impressionnisme était déjà dépassé depuis des lustres. Il aura survécu au tournant du siècle et à deux guerres mondiales pour se voir méjugé comme peintre démodé.

Sous la plume de Goffette, il reprend vie et la poésie simple de l'auteur sert joliment l'amour viscéral d'une peinture vivante - car il ne s'agit pas de peindre la vie. Il s'agit de rendre vivante la peinture. -, d'une peinture modeste, loin des fastes de la vie mondaine artistique, dans le cocon du couple et de la nature. Marthe est celle qui guide la création, celle qui révèle sa nudité sous le regard de l'artiste. Bonnard peindra des centaines de Marthe toujours nue au bain, au bas, à la fenêtre. Marthe est la fenêtre ouverte sur la création.

Mon avis aurait pu être très enthousiaste si je n'avais pas senti - peut-être à tort ? Peut-être seulement parce que j'apprécie la douceur et la simplicité avec parcimonie ? - Goffette perdre un peu de sa force poétique à mesure des pages, à tel point que j'ai plus apprécié les citations de Bonnard dans les dernières parties que le texte de Goffette.

Je ressors finalement heureuse de la rencontre avec Bonnard, plus mitigée de la rencontre avec Goffette, et avec l'envie, surtout, de continuer à découvrir le peintre - tant sa peinture que ses différents textes réunis cette année par L'Atelier contemporain en deux recueils à découvrir ici.

Il y a peu de gens qui savent voir, disait Bonnard, bien voir, voir pleinement. S'ils savaient regarder, ils comprendraient mieux la peinture.

S'ils savaient voir, ils sauraient vivre. Dépasser le corps empêtré dans sa boue. Dépasser le présent de toutes parts qui les assaille et qui n'est que Maya, l'Illusion. Dépasser le sujet de la toile, sa forme et ses couleurs, pour entrer dans le tableau, rejoindre le peintre, et continuer sa vision avec leurs moyens propres. S'ils savaient voir, ils ne diraient pas que le bonheur existe ou Dieu ; ils emploieraient des mots corrects. Ils connaîtraient que tout est au-delà du visible et que rien de ce qui vit ne meurt. Que la mer est toujours derrière la mer, infinie, éternelle. Comme l'amour. p. 123-124

 

le mois belge.jpgQuatrième participation au mois belge 2016 d'Anne et Mina

LC Guy Goffette avec Le livre d'après, Mina, Ellettres, Martine, Icath, Nadège (un billet par-ci, un billet par-là), Anne

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Commentaires

Très beau billet sur ce livre ! J'ai ressenti à peu près la même chose que toi et il est vrai que le texte est un peu inégal, et que j'ai moins accroché vers la fin.

Écrit par : Florence | 19/04/2016

Ah ! Je viens justement de commenter sur ta chronique que tu avais l'air plus enthousiaste que moi...mais finalement non alors ! Tu es donc d'accord : c'est globalement inégal... Certains passages perdent de leur poésie pour devenir trop factuels, assez fades... C'est dommage car, à l'inverse, certains morceaux sont élégants, subtils, inspirés...

Écrit par : Lili | 19/04/2016

Très beau billet, je trouve aussi. Cela donne vraiment envie de découvrir quelques toiles de Bonnard. Je n'ai pas bien compris ce que tu reprochais à l'écriture de Goffette, sur la fin : sa trop grande simplicité ? Moi aussi il m'a un peu couru sur le haricot à la fin d'un "Été autour du cou". Moi je trouvais qu'il en faisait un peu trop.

Écrit par : ellettres | 19/04/2016

Oui, une simplicité qui finissait par ne plus avoir grand chose à faire avec la poésie... Du coup, ça donne à l'ensemble un style inégal, c'est dommage. Par contre, j'ai indéniablement découvert Bonnard avec très grand plaisir !

Écrit par : Lili | 19/04/2016

C'est amusant, je n'ai pas été gênée par la différence de style à la fin : on est dans l'après Bonnard, ça me semblait normal d'avoir ton un peu plus neutre, plus journalistique, limite. Ceci dit, j'ai découvert Bonnard aussi (et je vais de ce pas essayer de parler de ma lecture en rédigeant enfin mon billet !!)

Écrit par : Anne | 19/04/2016

Ah oui ? Je n'avais pas pensé à cette manière de voir, elle est intéressante ! Hâte d'en lire plus sur ton billet, du coup ;)

Écrit par : Lili | 19/04/2016

Ah un premier avis plus mitigé quant à Goffette dans la LC : j'ai aussi remarqué cette inégalité du style, mais dans des livres ou articles différents, sans que ça ne me gêne donc. L'interprétation d'Anne est intéressante, j'y penserai en lisant à mon tour ce livre-ci.
Pour les éditions L'atelier contemporain, je ne peux que te les recommander et me réjouir que ce soient eux qui aient réédités ces textes : leurs livres sont d'excellente qualité et très agréables en tant qu'objets (outre la qualité des textes sélectionnés que j'ai lus).

Écrit par : Mina | 20/04/2016

Merci pour ta confirmation qualitative à l'égard de L'Atelier contemporain. Je note donc que je peux m'y tourner les yeux fermés !

Écrit par : Lili | 21/04/2016

Arf, les passages de Goffette, cet entassement de lieux communs...

Écrit par : Charline | 20/04/2016

Déconne pas, ce sont parmi les morceaux les plus poétiques... Du coup, dans ceux-là, l'entassement de lieux communs ne m'avaient pas arraché les yeux. Mais il faut bien avouer que dans d'autres parties, bon...

Écrit par : Lili | 21/04/2016

J'ai lu d'autres billets qui ont apprécié ce roman dans le cadre du mois belge. J'aime beaucoup la peinture de Bonnard, mais je ne connais pas sa vie. Je note.

Écrit par : maggie | 21/04/2016

Oui, globalement, les avis sont plutôt unanimes sur Goffette ; le mien est plus nuancé mais pas acerbe pour autant. Ce n'est juste pas ce que j'ai lu de mieux dans la même veine :)
Il n'empêche que la vie de Bonnard, et sa peinture, sont par contre passionnantes à découvrir !

Écrit par : Lili | 21/04/2016

Les commentaires sont fermés.