27/05/2013
Kyoko de MURAKAMI Ryû
Kyoko de Murakami Ryû, ed. Philippe Picquier, coll. Picquier poche, 2000, 228p.
Je vous racontais l'an dernier en chroniquant 1969 qu'un hasard de librairie me faisait entamer l'oeuvre de Murakami Ryû par un roman plutôt atypique. Dans ce dernier, point de noirceur, de drogue ou de sexe à outrance mais plutôt l'esprit festif et rafraîchissant des années 70 et une jeunesse pleine d'espoir. Je comptais profiter du challenge d'Adalana pour plonger dans un roman un peu plus sombre, tâter de sa plume plus corsée. Mais le seul exemplaire de Murakami présent à la biblio dans cet esprit était en réparation et, honnêtement, ça ne me tentait pas assez pour acheter. J'ai donc opté à la place pour un autre roman plutôt jouissif que voici (Murakami Ryû a donc écrit au moins deux romans positifs, dingue!) :
La vie de Kyoko n'a pas terriblement commencé. Orpheline très tôt, elle est élevée en fille unique par son oncle et sa tante. Il la traite parfaitement mais la fillette souffre de solitude et un poids lui pèse malgré elle. Les seuls instants où elle se sent bien et légère, c'est lorsqu'elle danse avec José, un GI d'origine cubaine qui lui apprend le cha cha cha, le mambo ou la rumba. Au bout de quelques mois, José rentre aux USA. Il offre des chaussures de danse à Kyoko ; elle lui offre une clochette japonaise.
Treize ans plus tard, Kyoko n'a jamais oublié José et n'a jamais cessé de danser. Elle a économisé chaque centime de son salaire de chauffeur poids lourds pour voyager jusqu'à New York retrouver José. La danse l'a sauvée et lui a permis de vivre. Elle veut remercier celui qui lui a donné ce bonheur.
Dès lors, s'engage un road trip émouvant dans la grande pomme puis jusqu'à Miami où Kyoko croisera bien des personnages et bien des rebondissements.
Voilà une bien bonne surprise ! J'ai entamé Kyoko en pensant passer un bon moment sans prétention, ce qui a été le cas, mais j'ai aussi trouvé plus dans ce roman. Le personnage de Kyoko est riche et multiple. Malgré son enfance difficile, elle apparaît comme une jeune fille d'une grande force qui irradie et se communique à ses compagnons. Elle est gracile et douce et pourtant dégage un charisme particulier. En lisant, j'avais souvent l'impression qu'il émanait de Kyoko une lumière comme on peut se l'imaginer d'une icone. Néanmoins, elle n'est pas que cette représentation éthérée. Elle est aussi une danseuse remarquable, un peu têtue, loin d'être naïve, buveuse de cocktails à ses heures et d'une grande empathie. Kyoko rallie tout le monde et subjugue dans sa grande simplicité car elle est l'incarnation de la détermination et de l'espoir. Jamais elle ne lâche prise malgré les difficultés et, en cela, une sorte de modèle, d'allégorie, de la foi en la vie.
Et puis, sans rentrer trop dans les détails au risque de spoiler, Murakami Ryû nous offre également de très belles pages sur le quotidien et les difficultés d'un malade du sida (à replacer dans leur contexte puisque le roman a été écrit en 1995). On ressent à la fois la douleur et le rejet que peut subir un malade mais aussi la solidarité qui s'établit entre lui et son soignant. L'auteur plante ainsi les graines de la tolérance en plus de celle de l'espoir.
Alors bien sûr, on pourrait objecter que le livre est pétri de bons sentiments à la limite de la mièvrerie. C'est vrai qu'il n'est pas courant de lire un livre véhiculant des valeurs aussi positives, surtout chez un auteur comme Murakami Ryû. Mais pourtant peu friande des mièvreries, ce livre m'a touchée parce que justement, il ne lisse pas complètement le réel. La dureté de la maladie, les embûches d'un projet qu'on rêvait facile ne sont pas gommées. Certains rebondissements, certes, sont un peu cousus de fil blanc pour les besoins de la progression narrative - mais comme dans tout roman. A noter en outre que Murakami semble avoir écrit cet ouvrage après en avoir réalisé un film (si j'ai bien compris). Cette histoire est bien plus à prendre comme une parabole que comme une affaire réaliste, de toutes façons, sinon on risque de passer à côté de l'essentiel. J'ai beaucoup pensé au film en lisant. Des images me sont venues souvent à l'esprit et je me représente tout à fait le genre de film qui pourrait être réalisé avec un tel synopsis. J'essayerai de trouver le film pour voir s'il correspond à ce que j'ai imaginé ^^
Challenge Petit Bac 2013 chez Enna
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Challenge Ecrivains Japonais 2013 chez Adalana
Mois de mai consacré à Murakami Ryû
08:37 Publié dans Challenge, Littérature asiatique | Lien permanent | Commentaires (14)
Commentaires
Comme toi j'ai trouvé que Kyoko "irradiait" , un excellent livre (effectivement peut être pas très réaliste et même un peu "conte" ;-)
J'ai adoré ;-)
Écrit par : valentyne | 27/05/2013
C'est cette atmosphère de conte qui est rafraîchissante justement. On a pas toujours besoin de réalité décapante après tout ;) J'irai pas jusqu'à dire que c'était excellent mais clairement agréable oui !
Écrit par : Lili | 27/05/2013
Je n'aurais pas le temps de le lire pour le challenge (c'est celui-là aussi que j'avais choisi) mais j'y viendrai quand même, il me donne envie :)
Bonne journée Lili bisous bisous ;)
Écrit par : laure | 27/05/2013
Si tu n'as pas le temps ce mois-ci, ça fera une excellente lecture d'été !
Belle soirée à toi Laure, pleins de bisoux ¨¨**¨*
Écrit par : Lili | 27/05/2013
Bonjour Lili, je vois que tu as aimé aussi, tant mieux. Je ne l'ai pas trouvé mièvre, plutôt humain et sensible, il y a une belle atmosphère malgré la maladie. Bonne soirée et à bientôt.
Écrit par : Coccinele | 27/05/2013
Oui, il est humain, plus que mièvre. Je suis parfaitement d'accord avec toi !
Belle soirée Coccinelle !
Écrit par : Lili | 27/05/2013
Ce n'est effectivement pas du tout le même style que le mien (Miso Soup, pas encore fini mon billet) qui m'a menée au bord de la nausée...même si le début était intéressant.
Écrit par : Shelbylee | 27/05/2013
Justement, je n'avais pas trop envie de nausées là... :D Mais il n'empêche que je lirai ton billet avec grand plaisir !
Écrit par : Lili | 27/05/2013
Ça change radicalement de ce que j'ai lu pour le challenge ! L'histoire ne me branchait pas trop mais à la lecture de ton billet, je me dis que ce serait passer à côté de quelque chose ;)
Écrit par : Natiora | 28/05/2013
Oui, le livre dégage une atmosphère qui fait du bien et dont on aurait tort de se priver !
Écrit par : Lili | 28/05/2013
Loin de celui que j'avais lu il y a quelques temps en effet. J'ai aussi "Les bébés de la consigne automatique" dans ma PAL. Et tu me donnes envie de découvrir ce titre. Malheureusement, je n'ai pas le temps de participer à ce challenge ce mois-ci.
Écrit par : Manu | 29/05/2013
C'est pas grave, pour une prochaine fois ! Hâte de te relire, n'empêche :p
Écrit par : Lili | 29/05/2013
je l'ai lu moi aussi et j'avais beaucoup aimé ce personnage. Et par rapport à ce que je lis sur ses autres œuvres, j'ai plutôt envie de m'arrêter là.
Écrit par : Anis | 02/06/2013
Oui moi aussi ! J'ai été voir ta chronique : elle est un très bel hommage au personnage de Kyoko !
Écrit par : Lili | 02/06/2013
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