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12/08/2011

Amour de Hanne Orstavik

 

 

Amour de Hanne Orstavik, Les Allusifs, 2011, 133p. (Edition originale : Kjaerlighet, Forlaget Oktober, 2004)

 

Vibeke et son fils Jon, bientôt 9 ans, habitent au nord de la Norvège depuis quelques mois. De cette contrée, ils ne connaissent que l'hiver, les étendues impénétrables et froides qui se glissent mine de rien entre les gens. 

Elle est chargée des actions culturelles de la ville, nourrit une passion dévorante pour la lecture et attend inlassablement l'être aimé en regardant la rue. Lui semble lunaire, à la fois si grand et si fragile, lorsqu'il part vendre dans la  nuit ses tickets de tombola ou lorsqu'il tente de réprimer ses clignements d'yeux intempestifs. Et toujours ce train dans sa tête qui l'emporte.


Amour relate une soirée de ce couple étrange qui s'éloigne et se perd. Un roman dans lequel la communication et les sentiments se délitent peu à peu jusqu'à devenir impossibles - il n'y a plus qu'un mur glacial entre les êtres qui ne savent ni se parler, ni s'aimer. Une attente qui ne saurait avoir de fin puisque jamais personne ne va vers l'autre : un drame parfaitement moderne, en somme, servit pas une langue chirurgicale, précise, dégagée de tout pathos. Qui saisit le gouffre entre les êtres par la minutie des petites choses et l'alternance cadencée des points de vues.

A la lecture de cet ouvrage, tout un mélange de sensations : l'ennui, la révolte, l'indifférence, l'étrangeté. L'amour, très loin derrière la glace. 

 

 

*

 

 Extrait

 

Jon essaie de se retenir de cligner des yeux. Il n'y arrive pas. À cause des crampes des muscles autour de ses yeux. Le silence est absolu. Il attend le retour de Vibeke. Il essaie de garder les yeux ouverts et fixes, il braque son regard sur un point de l'autre côté de la fenêtre. Il y a au moins un mètre de neige. Dans la terre, sous la neige, vivent des souris. Avec leurs galeries et leurs canaux. Elles se rendent visite, se dit Jon, peut-être qu'elles s'apportent à manger.

Le bruit de la voiture. Quand il l'attend, il n'arrive pas à s'en souvenir dans sa tête. Je l'ai oublié, se dit-il. Puis il vient, souvent quand il s'interrompt dans son attente et n'y pense plus. Alors, elle arrive et il reconnaît le bruit, il l'entend, dans son ventre, c'est mon ventre qui se souvient du bruit, pas moi, et juste après avoir entendu la voiture, il la voit, dans un coin de la fenêtre, sa voiture bleue débouche du virage derrière la congère en contrebas, elle la fait tourner vers la maison et remonte la petite côte jusqu'à l'entrée.

 

*

 

 

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