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14/08/2011

Les derniers jours de Stefan Zweig de Laurent Seksik

 

 

Les derniers jours de Stefan Zweig de Laurent Seksik, Flammarion, 2010, 187p.

 

C'est le roman de la fin d'un monde et du vent au-dessus de l'abime,
l'exil ontologique de celui qui, très tôt, a la prescience du danger hitlérien et s'engage dans une fuite perpétuelle. Il fuit l'Autriche en 1934 et ne cessera plus de le faire pendant huit ans.
D'abord en Angleterre, où il rencontre sa seconde femme Lotte. Puis à New York et finalement au Brésil. Et c'est avec la vision sereine et mélancolique d'une malle nouvellement arrivée à Pétropolis que s'ouvre le roman de Seksik.

Nous voilà chez le couple Zweig de septembre 1941 à février 1942, au coeur du Brésil et de leur quotidien. Nul travail de biographe pointilleux ni exegèse des derniers travaux de la part de l'auteur. Ils sont simplement nus avec leurs peu de livres et sans plus de patrie, tentant de survivre et d'écrire. On croise des paysages exotiques, le marché, le Joueur d'échec et ces intellectuels également exilés : Bernanos, Ernst Feder, Abroho Koogan. Tout appelle à l'espoir, à l'engagement - à la Vie. Pourtant, derrière cette façade toute pastel et surannée, Zweig est l'inconsolable et d'un humanisme si absolu qu'il ne peut concevoir d'avenir aux atrocités du présent. Si la plume écrit encore, l'homme est brisé. Quant à sa femme, asthmatique et d'une amoureuse abnégation, elle s'évertue à prier et à être celle dont son époux a besoin : l'oreille, l'amie, la distrayante, l'accompagnante au bord du gouffre.

C'est avec une respectueuse pudeur et la simplicité de l'hommage sincère que Laurent Seksik déroule pour nous le quotidien de ce lent suicide que scande les mois comme tourne l'aiguille.  Un roman délicat, fascinant et plein d'empathie qui se lit avec une pointe de recueillement.

Et l'on serait tenté d'attribuer à Zweig lui-même ce qu'il avait écrit de la mort de Kleist - "Ce coeur troublé a trouvé la paix, se sent en communion avec l'univers, il parvient à faire de sa souffrance un monument impérissable [...]. Il a su mieux mourir que vivre : sa mort est un chef-d'oeuvre"

 

*

 

Extrait :

 

"Pour moi, l'intérêt de tes livres réside dans le mystère de cette relation entre le narrateur et son interlocuteur. Plus encore que le héros, c'est le confesseur qui me fascine, cet être resté dans l'ombre et qui jamais ne juge. Contrairement à la plupart des écrivains, tu n'es pas le héros de tes romans, ton je se promène tout entier dans cet être qui reçoit, impassible, le récit des malheurs du monde... Ce qui demeurera de tes nouvelles, ce n'est pas tant le récit du monde ancien, ton cher monde disparu, mais la chronique d'une dévastation. 

Détrompe-toi si tu espères rester comme le plus grand conteur des temps flambants anciens, le chantre de la nostalgie. Les personnages de tes livres témoignent de la désintégration du monde... Et, pardonne ma franchise, tes héros ne font que raconter ta propre blessure, dresser l'inventaire de ta longue dérive. Tu refuses de militer, de signer nos pétitions, de te battre avec les mouvements des exilés, tu as même espéré un temps en Chamberlain, c'est dire! Mais ton militantisme est ailleurs, tu es engagé dans le processus de destruction du monde. "

 

 littérature,critique,zweigChallenge Zweig chez Métaphore

1ere lecture

 


 

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