15/10/2012
Rose de Tatiana de Rosnay
Rose de Tatiana de Rosnay, ed. Héloïse d'Ormesson, 2011 / Le Livre de poche, 2012, 250p.
Voilà une quinzaine d'année que Rose Cadoux, veuve Bazelet, observe inquiète les travaux qui ravagent sa ville. Car les boulevards larges et le Paris moderne du baron Haussmann se taillent une route au travers des anciennes maisons où jadis, des familles ont vécu et aimé, sans un regard sur ce passé. Or, Rose tient plus que tout à sa maison. Elle a promis à feu son mari qu'à aucun prix elle ne la laisserait détruire et elle compte bien tenir sa promesse. Aussi, le jour où la fameuse lettre arrive ordonnant le passage de la rue de Rennes au travers de la rue Childebert, signant ainsi la fin de son édifice chéri, elle entame une longue lettre à son époux. Elle y retrace avec douceur et nostalgie leur vie dans cette maison, la vie de leur quartier et le déroulement des travaux. Dès le début, on connait l'issue : Rose tiendra sa promesse et si la maison doit tomber, elle tombera avec.
Je vais être tout à fait franche avec toi, lecteur : Je ne suis pas partie avec un excellent a priori de Tatiana de Rosnay. Un certain nombre de bons amis à l'esprit critique averti m'avait brieffé sur l'auteur en ne m'en faisant pas que des éloges, aussi j'ai abordé cet ouvrage avec l'esprit un poil orienté et l'oeil dubitatif. Sont-ce ces a priori qui sont à blâmer, je ne saurais dire, mais le fait est que je ne ressors effectivement pas emballée.
Disons que le contexte historique est passionnant : les chamboulements haussmaniens, le Paris moderne confronté au désarroi des expropriés de leurs maisons ancestrales. Voilà un thème fait pour moi et un excellent noeud pour mettre en perspective petite et grande Histoire. Pourtant, je n'ai pas spécialement accroché au traitement qui en est fait ici. Sans doute parce que l'entier de l'ouvrage nous est offert du point de vue de Rose et qu'il souffre d'un défaut majeur que personnellement, j'ai beaucoup de mal à apprécier : la mièvrerie.
J'ai lu pas mal de propos à droite à gauche sur la blogosphère concernant le côté touchant, poignant et j'en passe de ce personnage. J'avoue le trouver surtout gentillet dans le mauvais sens du terme - ce qui a tendance à ne pas du tout me toucher. Du coup, même les passages à caractère historique revêtent cet aspect un poil trop sentimental et ne m'ont pas embarquée.
En outre, d'autres éléments me semblent pécher : ce fameux "secret" sur lequel Rose ménage le suspens jusqu'à la fin devient cousu de fil blanc. D'une parce qu'elle repète à plusieurs reprises en début de chapitres "mais il faut que je vous parle de ce secret", ce qui devient lassant, de deux parce qu'on saisit assez rapidement de quoi il s'agit et que ça casse pas trop pattes à un canard.
Le récit épistolaire de Rose est également entrecoupé de lettres de son passé et ces lettres là, pour le coup, tiennent le pompon du niais, en plus de ne servir à rien.
Enfin, un petit mot sur le style. Ce n'est certes pas mal écrit, entendons-nous bien. Les phrases s'enchaînent sans mal, la lecture est agréable, rapide même, comme tout bon livre de plage ou de voyage en train. C'est juste trop lisse pour moi, trop poli. Il n'y a, me semble-t-il à peu près rien à en retirer. Je n'ai pu m'empêcher de penser, tout le long de ma lecture, à ce que dit Zola des mêmes évènements historiques dans les Rougon-Macquart et notamment dans ces chapitres d'Au bonheur des dames où une petite boutique de parapluies vieille comme la ville (sont-ce bien des parapluies ? J'ai soudain un doute) se bat bec et ongles pour ne pas se faire avaler par le grand magasin. Exactement la même thématique mais un autre talent d'écrivain : là je peux vous dire qu'on est vissé au siège, la tristesse, la rage et le dégoût du marchand dans nos propres tripes. Dans Rose, c'est différent : on est plutôt en train de siroter un thé en trouvant l'instant plaisant mais sans plus et en cogitant déjà sur le livre suivant.
Cela étant dit, je vous livre quand même une phrase qui m'a bien plu, sans doute parce qu'elle fait montre d'un certain pouvoir évocateur :
"Qu'était devenue ma cité médiévale, ce charme pittoresque, ses allées sombres et tortueuses? Ce soir-là, j'eus le sentiment que Paris s'était transformée en une vieille catin rougeaude se pavanant dans ses jupons froufroutants."
*
Et même si ma lecture n'est pas fort élogieuse, je tiens à remercier Clochette pour cet ouvrage qu'elle m'a offert pour notre swap épistolaire ! Je pourrais maintenant parler de Tatiana de Rosnay en connaissance de cause !
09:00 Publié dans Littérature anglophone | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
je partage tout à fait ton point de vue. C'est bien écrit et bien documenté mais c'est plat et l'héroïne est agaçante, je n'ai pas aimé non plus !
Écrit par : bianca | 15/10/2012
Tu as tout à fait bien résumé !!
Écrit par : Lili | 15/10/2012
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