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04/03/2012

Dimanche graphique

Décidément, autant les romans peinent à trouver grâce à mes yeux en ce moment, autant je m'éclate complètement avec les BD. Ca doit être la période !

 

 

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Voyage en Satanie, Tome 1 de Vehlmann et Keracoët, Dargaud, 2011, 56p.

 

Dans Voyage en Satanie, un petit groupe d'illuminés mène une expédition spéléologique la recherche d'un scientifique disparu depuis deux mois. Parmi eux, sa jeune soeur aussi rousse que vaillante, un abbé à la langue fleurie, et un breton gagné par la folie des souterrains. Suite à une crue subite dont ils réchappent miraculeusement, les six explorateurs s'enfoncent de plus profondément dans la terre. Dans les nombreuses galeries qu'ils visitent, ils découvrent une société utopique puis des créatures étranges, supposées être la descendance des hommes de Néandertal, mi-hommes mi-démons : les sataniens. L'enfer existerait-il donc vraiment ?!

J'ai lu dans les critiques à droite à gauche que cette BD sympathique tiendrait autant du Voyage au centre de la terre de Jules Verne que de l'Enfer de Dante ses inspirations d'aventures métaphysiques. Personnellement, n'ayant lu aucun des deux livres (sans commentaire sur mes lacunes), je vais avoir du mal à vous vendre cette référence (même si, d'après ce que j'en sais lointainement, ça doit tout à fait coller). Je me contenterai donc de vous dire que j'ai fort apprécié le rocambolesque de ces tribulations caverneuses et l'imagination totalement farfelue de cette hypothétique existence réelle de l'Enfer!  Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est l'occasion d'un débat d'idées entre la science et la religion (ça reste de la BD hein) mais c'est, ma foi, plutôt original et amusant!
En outre, l'abbé m'a définitivement conquise avec ses énervements à l'emporte-pièce!
Bref, vivement la sortie du Tome 2.

 

 

 

 

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La Voix, Tome 1 - Comme un murmure

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Tome 2 - Haut et Fort, de Pascal Bertho, Korkydü et Aifelle, Vents d'Ouest, 2006 et 2007

 

 
Julius était jadis une star du cinéma muet, marié à une actrice superbe, Ana. Mais cette vie rêvée idyllique s'effondre avec le passage au cinéma parlant et le meurtre de sa femme dont il est suspecté et dont il se croit lui-même coupable. Il s'enfuit, change de ville, vit d'errance et croise la route d'un cirque dans lequel il finit par être embauché comme clown, à défaut de pouvoir faire autre chose, sans voix et sans talent particulier.
Ainsi passe quinze ans. Puis le cirque revient dans cette ville qu'il a quitté et les souvenirs reviennent ; revient aussi Ana, halo mystérieux et voix tant aimée, qui tentera de rétablir la vérité sur son assassinat.
 
Cette BD en 2 tomes n'est pas tellement, comme on pourrait s'y attendre, un récit policier. Après tout, tout est connu depuis le départ et aucun suspens ne pèse au fil des pages ; ce n'est donc pas là l'intérêt de l'histoire. C'est plutôt un joli conte en image sur l'amour, la culpabilité, le deuil et le cheminement de l'être vers la quiétude et la rédemption. Le scénario graphique est, de plus, habilement monté avec des flashback impromptus au fil des pages, rythmant cette quête de paix. Une jolie douceur.
 
 

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19/01/2012

La terre d'Emile Zola

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La terre de Zola, 1887, 500p.


Quinzième tome des Rougon-Macquart, La Terre s'attaque à l'univers paysan avec une âpreté qui n'a d'égal que ce sol hiératique.
Sur une période de dix ans, il s'articule autour de la famille des Fouan - parents, oncles et tantes, enfants puis petits-enfants - dont il brosse la descente aux enfers avec toute une cohorte de personnages-satellites mesquins, ignards et ivrognes sous le ciel de Rognes. C'est Jean Macquart, fils d'Antoine Macquart, qui représente ici l'illustre famille zolienne. Il apparaissait déjà dans La Fortune des Rougon où il était apprenti menuisier. Tiré au sort par la suite pour participer aux batailles de son siècle dont il sort physiquement indemne, c'est en Beauce, comme ouvrier agricole, qu'il aspire à couler des jours paisibles après les horreurs de la guerre. C'est ainsi qu'on le croise, semant son blé aux premières lignes du roman.

Le coeur de toute cette affaire, le véritable héros muet du roman, c'est la terre. Erigée en dieu inflexible, ce n'est pas tant ce qu'elle produit ou le travail qu'elle réclame qui aiguise les tempéraments mais bien sa possession. Avec une fureur bestiale, il s'agit d'avoir à tous prix car c'est l'avoir qui définira l'être, c'est ainsi qu'il pourra enfoncer ses racines et s'élever aux détriments des autres. Rien n'est épargné de la déchéance physique et morale de cette espèce avide, ni l'alcool, ni l'impudeur des relations, pas même le meurtre.

La terre comme dieu et les hommes comme bêtes, ainsi pourrait se croquer cet ouvrage. L'auteur continue d'explorer sans concession les aspects les plus sombres de l'homme, sans qu'aucune lueur d'espoir n'éclaire l'horizon, avec l'emprunte du siècle toujours en filigrane - notamment la révolution industrielle qui oppose les intérêts des ouvriers à ceux des paysans.
C'est là l'oeuvre riche et noire d'un bas peuple qui se débat et se grignote sans sa propre fange et que le lecteur ne pourra que lire comme on reçoit une claque magistrale.


*

Extraits :


"Alors, en quelques mots lents et pénibles, il résuma inconsciemment toute cette histoire : la terre si longtemps cultivée pour le seigneur, sous le bâton et dans la nudité de l'esclave, qui n'a rien à lui, pas même sa peau ; la terre, fécondée de son effort, passionnément aimée et désirée pendant cette intimité chaude de chaque heure, comme la femme d'un autre que l'on soigne, que l'on étreint et que l'on ne peut posséder ; la terre, après des siècles de ce tourment de concupiscence, obtenue enfin, conquise, devenue sa chose, sa jouissance, l'unique source de sa vie. Et ce désir séculaire, cette possession sans cesse reculée, expliquait son amour pour son champ, sa passion de la terre, du plus de terre possible, de la motte grasse, qu'on touche, qu'on pèse au creux de la main. Combien pourtant elle était indifférente et ingrate, la terre ! On avait beau l'adorern elle ne s'échauffait pas, ne produisait pas un grain de plus. De trop fortes pluies pourissaient les semences, des coups de grêle hachaient le blé en herbe, un vent de foudre versait les tiges, deux mois de sécheresse maigrissaient les épides ; et c'était encore les insectes qui rongent, les froids qui tuent, des maladies sur le bétail, des  lèpres de mauvaises plantes mangeaient le sol : tout devenait une cause de ruine, la lutte restait quotidienne, au hasard de l'ignorance, en continuelle alerte. Certes, lui ne s'était pas épargné, tapant des deux poings, furieux de voir que le travail ne suffisait pas. Il y avait desséché les muscles de son corps, il s'était donné tout entier à la terre, qui, après l'avoir à peine nourri, le laissait misérable, inassouvi, honteux d'impuissance sénile, et passait aux bras d'un autre mâle, sans pitié même pour ses pauvres os, q'elle attendait."

 

"- Ah! Tout fout le camp! cria-t-il avec brutalité. Oui, nos fils verront ça, la faillite de la terre...Savez-vous bien que nos paysans, qui jadis amassaient sou à sou l'achat d'un lopin, convoité des années, achètent aujourd'hi des valeurs financières, de l'espagnil, du portugais, même du mexicain! Et ils ne risqueraient pas cent francs pour amender un hectare! Ils n'ont plus confiance. Les pères tournent dans leur routine comme des bêtes fourbues, les filles et les garçons n'ont que le rêve de lâcher les vaches, de se débarasser du labour pour filer à la ville... Mais le pis est que l'instruction, vous savez! la fameuse instruction qui devait sauver tout, active cette émigration, cette dépopulation des campagnes, en donnant aux enfants une vanité sotte et le goût du faux bien-être..."

 

"Tous deux, le cultivateur et l'usinier, le protectionniste et le libre-échangiste, se dévisagèrent, l'un avec le ricanement de sa bonhommie sournoise, l'autre la hardiesse franche de son hostilité. C'était l'état de guerre moderne, la bataille économique actuelle, sr le terrain de la lutte pour la vie."





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Janvier 2012