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30/03/2012

L'inquiétude d'être au monde de Camille de Toledo

Une fois n'est pas coutume, chers lecteurs, c'est la plume d'un ami que je vais vous donner à lire aujourd'hui sur mon blog. Après tout, les lectures sont faites pour être partagées avec le plus grand nombre et j'ai trouvé cette note si intéressante qu'elle pourra peut-être vous inspirer une envie de lecture, qui sait !

 

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L'inquiétude d'être au monde de Camille de Toledo, ed. Verdier, 2012, 64p.

 

 

 

C’est suite à ma lecture de la critique dans le Magazine littéraire de Janvier dernier que je me suis décidé à plonger dans L’inquiétude d’être au monde de Camille de Toledo. Sobrement sous-titré « chant », l’auteur en une cinquantaine de pages cinglantes, sanglantes, expulse avec le souffle de l’agonisant sa vision d’un état de l’Occident en ce début de siècle neuf ; Occident frigorifié par la peur et dont les enfants rejouent les horreurs passées à petite échelle (les tueries symptomatiques de Columbine et plus récentes d’Utøya forment un refrain couplé au rappel de la Grande Guerre).

Les pures stylistes regretteront peut-être des effets de répétition à voir comme des lourdeurs de style mais l’essentiel n’est pas là mais bien dans le refus actuel de ne pas faire face, de se cacher derrière les parapets aux fils barbelés de l’Europe dite civilisée qui pourtant est livrée autant qu’elle se livre à une barbarie acceptée, si bien nommé « pop-fascism ». Plus qu’un déchant, c’est une secousse, un appel à résister « contre les promettants : ceux qui font commerce de la consolation, ceux qui vendent les solutions provisoires de la dépossession ». Salutaire pour la période qui s’ouvre, hygiénique en tout temps.

Nicolas Py

 

 

*

 

Extrait :

 

 

" Voyez, au vingt-et-unième siècle !
Quelqu’un frappe à la porte du petit jardin.
Là, juste en bas de chez nous.
Il frappe et sonne au petit portillon de bois.
Si c’est pas une misère,
nous l’avions justement repeint !

Contre le vent, la pluie,
nous le repeignons chaque année.
Nous croyons pouvoir ainsi garder
le contrôle du destin.
La peinture, c’est tout ce qu’il nous reste.
La peinture et le portillon, frontières
de l’homme ancien.
Et voyez, c’est un dimanche rassurant du mois de mai.
Des milliers de pères repeignent
le petit portillon de bois qui les sépare,
croient-ils, de la barbarie."

p. 38-39




27/03/2012

Poirot quitte la scène d'Agatha Christie

 

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Poirot quitte la scène d'Agatha Christie

 

"Soudain son ton redevint amer :

- C'est le côté déprimant de ces endroits, de ces pensions de famille dirigées par des gens bien nés, ruinés : elles sont pleines de ratés, de gens qui n'ont jamais rien réussi et ne réussiront jamais rien, qui ont été vaincus et brisés par la vie, de gens vieux, fatigués, finis.

Sa voix s'éteignit. Une profonde tristesse m'envahit. C'était tellement juste ! Nous étions tous là des gens au crépuscule de la vie : têtes grises, coeur gris, rêves gris. Moi-même, j'étais triste et solitaire, et la femme qui me côtoyait, amère et désillusionnée. Le Dr Franklin, plein d'ardeur et d'ambition, était contrecarré, avait les ailes coupées. Sa femme était la proie de la maladie. Le paisible petit Norton boitillait à la recherche d'oiseaux. Même Poirot, le brillant Poirot de jadis, était maintenant brisé, infirme."

 

*

 

C'est à Styles St Mary que Poirot enquêta pour la première fois sous la plume d'Agatha Christie et c'est tout naturellement en ce lieu qu'on l'y retrouve au moment de sa dernière affaire. Vieux, affaibli par la maladie, Poirot n'a plus le panache de sa grande époque. Seules ses petites cellules grises sont épargnées par l'inéluctable déclin de l'âge. Pensionnaire du Manoir où jadis il a enquêté, Hercule Poirot guette un meurtrier d'un genre bien particulier parmi les autres résidents - de celui qu'on se soupçonne pas tant son crime est parfait. Epaulé par Astings qui sera ses yeux et ses oreilles, il va tenter de démasquer ce mystérieux criminel avant qu'un nouveau meurtre ne soit perpétré.

Poirot quitte la scène ne devait être publié qu'après la mort d'Agatha Christie. Ecrit pendant la seconde guerre mondiale, loin donc d'être le dernier ouvrage de l'auteur, il était destiné à assurer une sécurité financière à sa fille grâce aux revenus de la publication au cas où la romancière viendrait à mourir brutalement. Elle finira pourtant par céder à son éditeur en le publiant dans les dernières années de sa vie, en 1975.

Que vous dire si ce n'est que ce roman est parfaitement étonnant. Poirot sait qui est le meurtrier mais le cache à tous. Bien plus que les yeux et les oreilles de Poirot, Astings sera ceux du lecteur qui tatonne autant que lui pour comprendre ce qu'à déjà compris Poirot - en somme, nous menons l'enquête. Et je dois dire que je n'ai vraiment pas été brillante. J'ai bien eu quelques idées mais je ne me suis pas révélée plus inspirée qu'Astings et systématiquement, je ratais. Quant à la fin, rahhh. Je ne préfère rien vous en dire tant elle est surprenante à plusieurs niveaux. On croit que la boucle est bouclée avec ce retour au lieu des débuts de Poirot, pourtant l'auteur nous joue une pirouette finale magistrale. C'est vraiment un excellent Poirot que voilà !

 

*

 

agatha christie,poirot,astingsChallenge Agatha Christie

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agatha christie,poirot,astingsChallenge Un classique par mois

Mars 2012

25/03/2012

Dimanche graphique : quand on aime, on ne compte pas

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La cellule de Guillaume Long et Fabienne Costes, Casterman, coll. KSTR, 2008, 120p.

 

 

En voilà, une BD étonnante ! Guillaume Long s'éloigne de l'auto-fiction nonchalante pour donner vie à Simon, un gentil scientifique qui refuse les réalités qui fâchent. Et en voilà une somme toute assez banale : sa petite-amie musicienne le quitte, ne supportant plus leur relation trop étouffante où aucun dialogue n'est possible. Simon ne veut pas comprendre ni tourner la page. Il s'enferme progressivement dans une obsession dangereuse. Au début timide et touchante, cette obsession le conduit à lui téléphoner, l'apercevoir par la fenêtre. On a tous connu ça, on ne se méfie pas de la suite. Sauf qu'ici, l'obsession de Simon vire à la folie dans la deuxième partie de l'ouvrage. Le dessin et le propos deviennent complètement hallucinés, les réalités s'entremêlent, frisent l'incohérence. Le lecteur est en prise avec la déroute du personnage qui n'a plus aucun repère si ce n'est de toujours s'accrocher à la femme qu'il aime dans l'espoir de ne faire qu'un avec elle.

Un ouvrage complexe et audacieux, La cellule est le récit d'une dérive où le lecteur est en prise directe avec l'angoisse d'une folie qui ne tient qu'à un fil. Je vous encourage vivement à plonger dans cet univers si original, c'est un gros coup de coeur ! (Décidément, Guillaume Long, tu déchires!)

 

 

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*

 

 

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Dieu n'a pas réponse à tout (mais Il sait à qui s'adresser) de Benaquista et Barral, Dargaud, 2008, 68p.

 

 

Là, c'est sûr, c'est beaucoup moins déroutant. C'est de la BD comme on les aime - en tout cas, moi, j'avais adoré le premier tome et j'ai encore préféré le deuxième que voici, c'est vous dire !
Toujours le même principe : Dieu a parfois du mal à gérer les crises existentielles de ses chers humains mais Dieu a toujours de la ressource. En cas de panne sèche miraculeuse, il dégote un de ses pensionnaires paradisiaques pour résoudre le problème et évidemment, le dit-pensionnaire est toujours l'homme de la situation : que des happy-end qui font plaisir après quelques péripéties amusantes.
Je dois vous dire que j'étais comme une petite gamine frétillante lorsque j'ai vu que Benaquista et Barral ont fait revivre Agatha Christie rahhhhhh ! Mais, je n'en dis pas plus ! Je vous laisse le soin de découvrir cet ouvrage si vous voulez vous reposer les neurones après une bonne journée/semaine de boulot !


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