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30/09/2011

L'étrange vie de Nobody Owens de Neil Gaiman

 

J'ai beau avoir quitté son précédent roman jeunesse avec grande déception il y a longtemps, mon côté vieille goth nostalgique aime bien aller voir de quoi il retourne quand il est question de cimetières et autres joyeusetés de ce genre. D'où la lecture de cet autre roman jeunesse de Neil Gaiman déniché par hasard.
Et en surfant rapidement sur la toile, je me rends compte qu'il a fait grand bruit sur les blogs littéraires à sa sortie. Et ben voilà, moi j'aime bien arriver après la bataille, ça fait original (comme si c'était la première fois, en plus).



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L'Etrange vie de Nobody Owens (originellement The Graveyard Book) de Neil Gaiman, Albin Michel, Coll. Wiz, 2009

 

 

Neil Gaiman avoue en fin de livre son amour d'enfance pour le Livre de la Jungle qu'il a lu, lu et relu. Grand bien lui en a pris de le digérer aussi savamment pour en distiller une version toute en noir et blanc et en fantômes.

Nobody Owens survit tout jeune enfant à un mystérieux meurtrier qui élimine toute sa famille. Orphelin, c'est le monde des morts qui l'accueille et c'est avec lui que le garçon va grandir, apprendre et vivre son enfance. Un couple de fantôme l'adopte comme leur fils et Silas, citoyen libre du cimetière, devient son tuteur. Chacun lui distille les leçons nécessaires à sa survie dans cet étrange univers - Il parvient donc à maîtriser l'art de l'Effacement, de l'Effroi ou de la Hantise qui lui seront fort utiles.
D'amitiés en aventures paranormales, Nobody Owens apprendra progressivement à quel monde il appartient.

J'avais déjà pris plaisir à cette lecture mais quand j'y suis revenue avec l'éclairage du Livre de la Jungle, j'ai carrément trouvé le livre excellent. C'est une adaptation très fine et érudite où l'on peut retracer toutes les grandes lignes du livre maître tout en étant plongé sans ambiguité dans l'univers si personnel de Neil Gaiman.  Ici, la noirceur cotoie la magie, les cauchemars les rêves.

A lire tant avec la fraîcheur de la jeunesse qu'avec les éclairages littéraires de l'âge adulte.

(Et laisser le titre original du livre ou, du moins, le traduire avec un plus grand souci de conserver le parallèle avec le livre maître sus-nommé aurait été judicieux de la part du traducteur. Enfin, moi je dis ça, je dis rien.)

 

27/09/2011

Les livres qu'on a envie de relire

En lisant le dernier billet de Fashion, inspiré par The Broke and the Bookish, pleins d'envies de relectures me sont venues à l'esprit (certaines me trottaient depuis déjà un petit moment, j'avoue). Plutôt que de faire un long commentaire en réplique, je poste la liste ici du coup, ce sera plus pratique, et plus agréable.

 

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- Mrs Dalloway de Virginia Woolf. Oui, encore. Ce livre-là me suit partout et à chaque fois, j'en saisis de nouvelles nuances, de nouveaux éclairages. Pour résumé, je suis toujours autant amoureuse.Si je ne devais en relire qu'un, ce serait inlassablement celui-là (il faut imaginer un petit coeur ici).

- Les liaisons dangereuses de Laclos. Je me faisais dernièrement la réflexion que je l'avais sacrément délaissé depuis plusieurs années. J'y reviendrai bien pour voir si ce n'était qu'une relecture frénétique d'ado ou si je suis toujours autant enthousiaste.

- Eloge de la nage d'Annie Leclerc. En revenant de la piscine l'autre jour, je me suis rappelée ce bouquin (oué, les raisons qui président à l'envie d'un bouquin sont pas toujours hautement intellectuelles). Au lieu de le rouvrir, j'en ai racheté un nouveau de l'auteur. Mais j'ai toujours celui-là en tête. Je me rappelle une écriture pertinente et lumineuse.

- La Confusion des sentiments de Zweig. J'ai découvert Zweig sur le tard et ce livre a été une sacrée claque. Il faudra que j'y revienne à tête reposée.

- Bliss de Shauna Cross. Tout simplement le meilleur bouquin pour ado que j'ai jamais lu.

- Voyage au bout de la nuit de Céline. J'ai détesté ce livre. En même temps, j'avais 15-16 ans et j'ai surtout rien du comprendre puisqu'il parait que c'est génial. Un jour, j'aurai le courage de retourner voir ce qui s'y passe (Un jour...)

- Alcools d'Apollinaire parce que je l'ai trop injustement survolé.

- Tendre est la nuit de Francis Scott Fitzgerald. Tiens d'ailleurs, ça me fait penser que je l'avais prêté à quelqu'un et que je l'ai jamais revu. Damn.

- Les contes de fées de tout le monde et personne en particulier. La récente lecture des Soeurs Grimm me titille encore et je replongerais bien dans quelques contes de fées originaux. Enfin, je dis replonger mais pour être honnête, je suis pas sûre d'en connaître tant que ça qui ne soient pas retouchés par Disney... Hmm.

- Le moine de Lewis. LE livre du romantisme noir. Enfin, surtout mon premier lu. Les autres m'ont tous moins bottés. Un ennui du genre ou bien ai-je simplement commencé par le meilleur ?

 

*

 



17:55 Publié dans Top Ten | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : top ten, relire

26/09/2011

Stoner de John Williams

 

Bonne nouvelle pour mon porte-monnaie : La bibliothèque de mon trou paumé a ENFIN reçu les nouveautés de la rentrée littéraire.
Mauvaise nouvelle pour mon envie de me jeter dessus : Un seul prêt de nouveauté est autorisé à la fois. Non mais c'est quoi cette restriction? Je suis outrée. Et le pire, c'est que c'est la seule médiathèque à une cinquantaine de bornes à la ronde (oui j'habite VRAIMENT dans un trou paumé). Faut absolument que je trouve un moyen de soudoyer le personnel.

 

Bref.

Puisqu'il n'en fallait qu'un, j'ai choisi celui là :

 

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Stoner de John Williams, traduit par Anna Gavalda, Le Dilettante, Sept. 2011 (paru pour la première fois aux USA en 1965)

 

 

Faut-il préciser que ce n'est pas le bandeau évoquant la libre traduction d'Anna Gavalda qui m'a incité à le lire? Ce sont plutôt ces quelques mots du résumé : "Il se voue corps et âme à la littérature" [...] "Célébration d'une âme droite enchâssée dans un corps que la vie a très tôt voûté, voilà le récit d'une vie austère en apparence, ardente en secret".
Et là, il se passe de ces brefs instants de découvertes livresques où on se dit "Nom de Dieu, ce bouquin est écrit pour moi, il FAUT que je le lise".

Concrètement, le livre est autant (si ce n'est plus) un hommage à la vocation d'enseigner (et j'ai bien pensé à vous, chers amis profs) qu'à la littérature en elle-même à travers la vie de William Stoner. Fils de paysan que ses parents ont envoyé à Columbia suivre un cursus d'agriculture, il se découvre une passion pour les Lettres, s'y lance à corps perdu et devient professeur dans cette même université. Sa vie, pourtant, est loin d'être heureuse et apparaît même un peu ratée : professionnellement, il ne décollera jamais du poste de maître de conférence, se marie avec une femme qui ne l'aime pas et qui lui mène la vie sacrément dure, sa fille lui échappe, et il doit abandonner l'amour qu'il trouve enfin (parce qu'à cette époque, c'est du plus mauvais effet).

Je me suis demandée au fil des pages ce qu'il y avait de si extraordinaire et de si lumineux pour que tant d'écrivains anglo-saxons le considèrent comme leur livre emblématique. Jusqu'à ce que j'avale de plus en plus de pages à la fois et que je sois littéralement scotchée vers la fin, les mains un peu fébriles et toute émue comme une gamine en me disant "merde, ça peut pas être fini, y a encore des choses à vivre!"

C'est vrai, sa vie en apparence est un peu ratée. Il n'arrive pas à grand chose de concret ni de brillant. Il est de ses vies qui ne marquent pas les mémoires. Mais même s'il lui arrive de se carapaçonner dans une indifférence protectrice, William Stoner vit, malgré tout. Il voit quand même la beauté du monde dans quelques petits riens de la vie et dans ses cours qu'ils préparent et donnent avec passion. Il assume ses choix et finit par accepter avec une lumineuse sérénité la mort qui terrorise tous les autres. Malgré tout, il a vécu pleinement. "Il eut soudain, et ce fut saisissant, conscience de sa quiddité. Plus qu'une sensation, ce fut une évidence : il était lui, William Stoner, et il sut qui il avait été."
Voilà, tout est là.

 

*

 

Extraits (oui, plusieurs, parce que je suis incapable de choisir entre ces 3 sublimes morceaux):

 

"Bien qu'il fût censé apprendre des bases de grammaire et de composition écrite à un groupe de jeunes étudiants des plus hétérogènes qui soit, il était impatient et enthousiaste de s'atteler à cette mission qu'il abordait avec le plus grand sérieux. Il prépara ses cours pendant la semaine qui précédait la rentrée et ce premier travail de déchiffrage entrabâilla la porte du monde infini qui s'offrait à lui. Il comprenant le rôle de la grammaire et percevait comment, par sa logique même, elle permettait, en structurant un langage, de servir la pensée humaine. De même, en préparant de simples exercices de rédaction, il était frappé par le pouvoir des mots, par leur beauté, et avait hâte de se lancer enfin pour pouvoir partager toutes ces découvertes avec ses étudiants."

 

"Mais pendant ces semaines loin d'Edith, il lui arrivait, lors de ses cours, de se laisser emporter par son sujet et de s'y perdre si intensément qu'il en oubliait ses doutes, ses faiblesses, qui il était et même les jeunes gens assis devant lui. Oui, il lui arrivait d'être tellement pris par son enthousiasme qu'il en bégayait. Il se mettait à gesticuler et finissait par délaisser complètement ses notes. Au début, il fut décontenancé par ces emportements comme s'il craignait de s'être montré trop familier avec les auteurs ou les textes qu'il vénérait et finissait toujours par s'excuser auprès de ses élèves, mais quand ils commencèrent à venir le voir à la fin des cours et que leurs devoirs manifestèrent enfin quelques lueurs d'imagination ou la révélation d'un amour encore hésitant, cela l'encouragea à continuer de faire ce que personne ne lui avait jamais appris.
Cet amour de la littérature, de la langue, du verbe, tous ces grands mystères de l'esprit et du coeur qui jaillissaient soudain au détour d'une page, ces combinaisons mystérieuses et toujours surprenantes de lettres et de mots enchâssés là, dans la plus froide et la plus noire des encres, et pourtant si vivants, cette passion dont il s'était toujours défendu comme si elle était illicite et dangereuse, il commença à l'afficher, prudemment d'abord, ensuite avec un peu plus d'audace et enfin... fièrement."

 

"Quand il était très jeune, William Stoner pensait que l'amour était une sorte d'absolu auquel on avait accès si l'on avait de la chance. En vieillissant, il avait décidé que c'était plutôt la terre promise d'une fausse religion qu'il était de bon ton de considérer avec un septicisme amusé ou un mépris indulgent, voire une mélancolie un peu douloureuse. Mais maintenant qu'il était arrivé à mi-parcours, il commençait à comprendre que ce n'était ni une chimère ni un état de grâce, mais un acte humain, humblement humain, par lequel on devenait ce que l'on était. Une disposition de l'esprit, une manière d'être que l'intelligence, le coeur et la volonté ne cessaient de nuancer et de réinventer jour après jour."

 

 

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