21/03/2013
Swap Dieux et Démons : mon colis !
A l'automne dernier, nous décidions avec Ayma du blog L'art en vrac de swapper ensemble. Nous nous connaissions déjà depuis un certain temps via un autre média et nous avions envie de partager ensemble un colis qui permettrait de mieux nous découvrir, par l'intermédiaire de nos blogs.
Notre dévolu s'est donc jeté sur cette troisième édition des swaps créatures fantastiques organisés par Petitetrolle et Plumeline sur Livraddict. Le thème de cette session printanière était "Dieux et Démons". Un thème plutôt atypique qui a le mérite de nous ouvrir un large champ de possibles !
C'est hier matin que j'ai reçu le colis, sur le fil et parce qu'Ayma est une petite sadique qui aime me torturer chaque matin devant ma boîte aux lettres (si, si, je dénonce :D). Autant vous dire que j'étais complètement impatiente !
Heureusement, je n'ai pas oublié les photos du colis emballé cette fois-ci :
J'ai découvert un joli paquet aux couleurs printanières (timing parfait pour la saison). Sous les paquets se cachaient toutes ces surprises :
Si jamais vous allez fureter sur le blog d'Ayma, vous constaterez que nous n'avons pas tout à fait les mêmes goûts littéraires. Et à l'occasion de ce swap, elle a décidé de m'emmener un peu du côté de ses plaisirs pour me faire découvrir de nouveaux horizons !
Pour cela, trois livres : L'âme du mal de Maxime Chattam (un ponte du thriller, je sais, mais que je n'ai jamais lu. C'est un des auteurs préférés de ma binôme!), Dracula l'Immortel de Dacre Stocker et Ian Holt (je suis curieuse de voir ce que donne une suite au Dracula original sachant que ce dernier est sensé être... définitivement anéanti...) et enfin une BD qui s'annonce très chouette, le premier tome de Siegfried d'Alex Alice parce qu'Ayma a compris que j'avais un faible pour les mythologies nordiques ^^
Du côté des gourmandises, les indépassables, que dis-je, les parfaitement délicieux After Eight (j'avoue, je suis une inconditionnelle - d'ailleurs, je les grignote à l'heure où j'écris), des Lindor et une maxi boîte de thé de Ceylan. Je vais me régaleeeeer !
Et pour finir, les surprises ! Certes, Ayma et moi ne partageons pas les mêmes univers littéraires mais nous avons par contre quelques accointances musicales. Aussi, nous nous sommes réciproquement envoyées un CD qui nous tient à coeur en guise de surprise : les grands esprits se rencontrent !
Ayma a opté pour un double album d'Athanor intitulé Le testament du diable ou La seconde apocalypse. Autant vous dire que je ne connais absolument pas ! Du peu que j'ai fureté sur le net, il s'agit d'un projet français réunissant des musiciens de plusieurs groupes différents et qui mêle rock progressif, metal symphonique et black metal (ce qui est facile à deviner vu le titre de l'album - non, parce que j'ai beau apprécier ce style musical, il faut avouer qu'en matière d'originalité thématique les musiciens de black sont souvent à la subtilité ce que mon dogue allemand est à la peinture sur soie, hmm v'voyez? ... :D). La suite lorsque mes oreilles le découvriront avec toute l'attention qu'il mérite.
Et le tout agrémenté de magnifiques marque-pages et d'une très belle carte d'inspiration japonisante comme j'aime !
Un grand merci à Ayma pour cette découverte que nous avons faite l'une de l'autre à travers nos mails et évidemment, pour ce chouette colis plein de nouveautés en tout genre !
J'espère que ce swap sera l'occasion de continuer à échanger et à apprendre à se connaître.
Si vous voulez voir le colis que j'ai envoyé à Ayma, c'est par ici.
07:23 Publié dans Swap | Lien permanent | Commentaires (6)
18/03/2013
La Légende de Bloodsmoor de Joyce Carol Oates
La légende de Bloodsmoor de Joyce Carol Oates, ed. Le livre de poche, 2012, 720p.
Je m'étais attaquée, pleine de temps libre et de courage au premier volume de la trilogie gothique de Oates en juin/juillet dernier. Et comme je l'avais fort apprécié malgré son abord parfaitement étonnant et aussi, avouons-le, parfois fastidieux, nous nous sommes engagées avec ma copine bloggeuse Missycornish à en lire le deuxième volume que voilà en lecture commune, joliment intitulé La légende de Bloodsmoor. Outre ce titre plein de promesses, j'ai aussi été fort attirée par la couverture à l'atmosphère pastel surannée (comme quoi, il en faut parfois peu pour donner l'envie à une lectrice) que l'auteure ne manquerait pas de démonter minutieusement à coup d'ironie, me disais-je, comme elle l'avait si bien initié dans Bellefleur. Et de fait, mes espérances n'ont pas été déçues !
Mais avant de vous parler plus avant de cette ironie qui est le coeur de ce texte, brossons tout d'abord le tableau.
En cette fin de XIXe corseté, une étrange narratrice - dont le lecteur ne connaitra jamais l'idendité - prend la plume et nous conte la déliquescence des Zinn sur les vingts dernières années du siècle. Tout semblait idyllique et poudré comme il sied pour cette auguste famille nombreuse dans la vallée de Bloodsmoor. Le père John Quincy s'adonnait à son passe-temps, si ce n'est sa profession, d'inventeur en tout genre tandis que sa femme Prudence lui donnait quatre filles aux personnalités fortes et distinctes : Constance Philippa, Octavia, Malvinia et enfin Samantha. Non contents de cette communauté sororale déjà conséquente et malgré leurs faibles revenus, ils adoptent ensuite la jeune orpheline Deirdre à l'âge de onze ans. A l'automne 1879, pourtant, tout bascule : Deirdre, alors âgée de seize ans, est enlevée par un mystérieux ballon noir - oui, elle est littéralement soulevée du sol par des mains inconnues et emportée dans les airs sous le regard médusé de sa famille impuissante. Dès lors, suivront vingts années pendant lesquelles les quatre autres soeurs prendront aussi la poudre d'escampette de ce territoire de Bloodsmoor - certaines par passion amoureuse ou du théâtre, d'autres pour échapper à l'obligation conjugale. Seule Octavia suivra la voie rangée qui était destinée à toute jeune fille de bonne famille de l'époque - elle connaitra malgré tout une vie maritale des plus surprenantes. Et le lecteur suit ainsi tour à tour ces vies jusqu'au glas du dernier jour de 1899 où la narratrice cesse son écriture, ne souhaitant pas s'aventurer dans le périlleux XXeme siècle.
Eclaircissons tout de suite un point important : Tout comme dans Bellefleur, Joyce Carol Oates ne met pas en place de narration ni d'intrigue suivies. Nous ne suivons pas, littéralement, les aventures d'une famille et nous ne sommes pas, de fait, tenus en haleine par ce qui est dit. Non. Dans cette trilogie, Oates a pris le parti de peindre plus que de raconter, du moins, c'est l'effet que me fait son écriture très appuyée, ornementée, parfois redondante. Elle a le souci de la petite touche qui fait mouche bien plus que du suspens. Néanmoins, elle nous gratifie dans ce deuxième volume d'une cohérence temporelle, ce qui n'était pas le cas dans le premier, il faut le noter !
Ainsi donc, tout est dans l'écriture. Et en matière d'écriture, je tire mon chapeau à l'auteure qui m'a tout simplement époustouflée. Elle parvient à jouer sur tous les tons surannés de l'écriture dix-neuviémiste et à articuler, comme le dit si bien la quatrième de couverture que je vous cite donc, "le sublime et le grotesque" pour nous asséner sous couvert de mièvrerie et de bien-pensance une ironie mordante. Cette fameuse narratrice anonyme semble être une dame d'âge mûr de la bonne société et met un point d'honneur à juger tout ce qui dépasse du cadre très strict des convenances de l'époque. Pourtant, elle fait preuve d'une omniscience flagrante qui l'inscrit immédiatement comme un double de l'écrivain et le lecteur décode à travers son verbe et ses nombreux italiques le regard acéré d'Oates.
Elle épingle avec une égale minutie et une égale intelligence la vie calibrée des femmes d'alors : une éducation qui apprend le silence, l'effacement, la mièvrerie, le respect de l'homme. Une éducation, en somme, qui n'offre absolument aucune autre perspective respectable que celle d'être épouse et mère sans broncher. Tout en semblant donner raison à Madame Zinn puis à Octavia, les deux seules qui pendant longtemps se conformeront à cette vision de leur sexe, la narratrice se moque pourtant cruellement d'elles lorsqu'elle donne à Prudence des réactions ridicules - même clownesques - à l'égard de John Quincy Zinn avant qu'il ne se déclare ou lorsqu'elle affuble la douce Octavia d'un mari aux moeurs sexuelles perverses exposées de manière également risibles.
Sont également saisis et disséqués le cercle artistique des gens de lettres et de théâtre à travers Malvinia Zinn devenue Morloch dont la vie est une caricature de Nana enrubannée, l'essor fulgurant du spiritisme à travers Deirdre des Ombres dont les séances virent souvent au spectacle de foire à cause d'esprits chafouins et incontrôlables, ou encore la question cruciale et souvent tue de la sexualité à travers l'ambivalence de Constance Philippa.
Toutes ces thèses forment un ouvrage d'une grande richesse que l'ironie cisèle avec une subtilité talentueuse.
Disons seulement que comme toute médaille, même la plus brillante à son revers. Aussi, malgré la pertinence et l'habileté de ce choix littéraire d'une peinture ironique sous forme de chronique familiale, le lecteur peut parfois éprouver quelques difficultés à faire défiler les pages du fait de passages très délayés pour pas grand chose et du fait d'un certain nombre de redondances dans les épisodes relatés : même s'ils ont leur raison littéraire, ce n'est pas toujours le plus agréable à lire. Pour être tout à fait sincère, il m'est arrivé de me mettre en lecture rapide, comme je l'ai fait sur du Balzac ou du gros roman russe - c'est parfois une question de survie pour arriver à bout d'une oeuvre qu'on sait excellente mais qui a aussi, parfois, la vertu de nous épuiser avec des circonvolutions fastidieuses.
C'est pour cette raison que je ne mets pas ce livre en "coup de coeur" mais je le conseille tout de même vivement tant il est excellent à tous points de vue. J'ai du coup déjà acheté le troisième et dernier volume de la saga gothique (qui peut, cela dit, se lire dans n'importe quel ordre), Les mystères de Winterthurn.
Sur ce, allons voir le billet de Missy : Il s'annonce en parfait contre-point du mien ! (j'ai déjà suffisamment blablater - et pourtant j'ai l'impression de n'avoir fait que survoler le livre)
Challenge Petit Bac 2013 chez Enna
Catégorie Lieu
08:50 Publié dans Challenge, Lecture commune, Littérature anglophone | Lien permanent | Commentaires (12)
14/03/2013
Et rester vivant de Jean-Philippe Blondel
Et rester vivant de Jean-Philippe Blondel, ed. Buchet Chastel, 2011, 245p.
Vingt-deux ans et déjà l'expérience de la solitude. A dix-huit ans, le narrateur perdait son frère ainé et sa mère dans un accident de voiture ; quatre ans plus tard, il perd son père dans les mêmes circonstances. Si jeune et déjà plus d'attache, avec un décor en noir et blanc sous les yeux comme avenir dérouté.
"J'ai vingt-deux ans et je suis le dépositaire de leurs histoires inachevées. J'ai vingt-deux ans et je suis un reliquat de récits. Une survivance. Un putain de séquoïa."
Pour continuer à vivre, il largue tout : l'appartement familial, les meubles, le pays. Tout est bradé pour filer à l'anglaise avec Laure, l'ex-petite amie et Samuel le meilleur ami, dans un road trip salvateur aux USA, sur la route d'une chanson obsédante de Lloyd Cole à propos de Morro Bay. Au fil du bitume, au volant d'une improbable Thunderbird, il retrouve peu à peu les couleurs - le rose d'un lever de soleil et d'une propriètaire de motel, l'ocre du grand canyon, le rouge des joues de Laure ; il s'effondre aussi car comme une vieille blessure, c'est lorsqu'on commence à cicatriser qu'on a mal.
"A l'hôpital, l'interne de service a expliqué que, dans la demi-heure ou l'heure suivant l'accident, le blessé est comme anesthésié. C'est à ce moment-là qu'il faut opérer.
Ce n'est qu'une fois la plaie recousue que j'ai commencé à avoir mal. Mal, d'un coup, à hurler."
Et puis lentement, la vie reprend ses droits. Car il n'y a qu'un appel au fond : rester vivant.
"C'est de ça que j'ai envie.
D'une affirmation de l'existence. De m'installer dans la permanence. De prendre ma place dans la bataille fragile et pitoyable des êtres humains qui posent des fondations et montent des édifices en sachant pertinemment qu'un jour ou l'autre, tout disparaîtra."
Découvert par hasard au fil de beaucoup de blogs, j'avais complètement raté la sortie de ce livre en 2011 : comme quoi, on a beau se targuer de bien connaître l'actualité littéraire, il y en a toujours qui passent entre les mailles du filet (même si je me demande honnêtement comme ça a pu se tramer, vu l'engouement qu'il a eu sur la blogosphère, mais passons).
Lisant les chroniques enthousiastes de son dernier roman, j'ai préféré me pencher sur cet ouvrage-ci pour découvrir Blondel et j'ai plus que bien fait, tant la claque qu'il m'a mise est magistrale.
J'ai entamé le livre innocemment, en me disant que oui, le style était vraiment pas mal, l'histoire touchante et rudement bien menée mais tout en restant la tête froide - j'étais comme il faut être avec un bon livre, ni plus ni moins. Et puis, j'ai commencé à me sentir dans un étrange état - proche semble-t-il d'une empathie pour le personnage. J'avais l'impression de ressentir un mélange de solitude, de lucidité un peu brûlante, de vide étourdissant et d'étonnement. J'ai mis un sacré paquet de temps avant de comprendre que je ressentais physiquement le livre ce qui ne m'était, pour ainsi dire, jamais arrivé. A ce stade, j'en étais à la moitié et j'ai donc, logiquement, enchaîné la dernière partie sans m'arrêter. Je me suis ensuite attelée à tout un tas de tâches pratiques de la vie courante pour évacuer doucement cette lecture - du moins, me retrouver moi-même.
Cela étant fait, et cela étant dit, je ne peux que louer ce témoignage de vie ébourrifant. Point de pathos, que des kilomètres de vérité brute, de sensibilité pure et d'une langue enlevée et profondément lucide. Un des plus beaux hommages sur ceux qui partent - et surtout sur ceux qui restent - qu'il m'ait été donné de lire jusque là. Il n'y a pas à se poser de question : prendre la route, vivre - et surtout dévorer ce livre.
09:00 Publié dans Coups de coeur, Littérature française et francophone | Lien permanent | Commentaires (6)