27/06/2013
La Carte du temps de Félix J. Palma
La Carte du temps de Félix J. Palma, traduit de l'espagnol par Marianne Millon, ed. Pocket, 2013, 730p.
En 1896, les voyages temporels font fureur. Le célèbre écrivain H.G.Wells vient de publier La Machine à voyager dans le temps et, plutôt que d'en retenir la morale à l'endroit d'un comportement humain contemporain, les londoniens se passionnent pour l'idée de traverser les siècles. C'est ainsi qu'un commercial ambitieux ouvre une agence de voyage d'un genre nouveau : la seule escapade à la carte propose de rejoindre le 20 mai 2000 - très précisément - pour assister à la bataille décisive entre hommes et automates sanguinaires.
De cet décor de base - l'Angleterre victorienne, l'imagination folle et la perméabilité temporelle - vont se tisser trois histoires au fil rouge de l'amour.
Dans la première, Andrew Harrington se désespère d'avoir perdu l'amour de sa vie huit ans plus tôt sous la lame de Jack l'Eventreur. Il souhaite donc plus que tout tenter un retour sur cette nuit fatidique pour se charger de l'odieux personnage et sauver sa bien-aimée.
Dans la seconde, une jeune demoiselle de bonne famille s'ennuit d'une vie et d'une époque qui ne lui conviennent pas. Lors d'une escapade en l'an 2000, elle tombe amour du capitaine humain victorieux, Derek Shackleton. Faisant fi des barrières du temps, ils vont tenter de s'aimer tant bien que mal.
Enfin, dans la troisième, le narrateur lève le voile sur bien des éléments de l'ouvrage entier, non sans montrer un amour franc et admiratif pour ce fameux écrivain qui est, finalement, le véritable protagoniste de l'histoire.
Autant vous le dire tout de suite : je suis complètement passée à côté de cette histoire ! Est-ce le fait de l'avoir enchaînée après un Virginia Woolf à côté duquel elle ne souffre pas la comparaison ? Pourtant, je l'ai entamée avec un grand plaisir à l'idée de plonger dans un roman rafraîchissant, un peu fou et original - en somme, un roman qui n'avait strictement rien à voir avec le précédent. Faisant fi, moi aussi, des barrières temporelles, je pourrais en outre voyager à l'époque victorienne et m'amuser de moult incohérences.
Le souci, c'est que ma lecture a été fréquemment laborieuse car autant certains passages sont savoureux à tous points de vue, autant d'autres sont délayés sans raison, simplistes et parfaitement inintéressants (on peut inclure dans cette deuxième catégorie de passages la quasi totalité de la deuxième partie soit près de 250 pages : une historiette mièvre au possible et imbuvable qui, plus qu'un pastiche, est surtout un très très mauvais pastiche). Du coup, mon intérêt étant en dent de scie, ma lecture l'a été aussi jusqu'à devenir franchement en diagonale pour pouvoir passer rapidement à autre chose (ce qui, vous en conviendrez, n'est pas d'excellent augure).
H.G.Wells
Pour ne pas être totalement noire, car je ne pense pas ce livre raté non plus, j'ai beaucoup aimé la déclaration d'amour que fait l'auteur au père de la SF, H.G.Wells. Car au fond, là est tout le propos du livre : rendre hommage à la naissance du genre - que l'on n'appelait pas encore science-fiction à l'époque mais "romance scientifique" en proposant au lecteur une promenade nostalgique, drôle, plutôt érudite aussi, "à la manière de". Félix J. Palma nous demande de nous mettre dans la peau d'un lecteur du XIXe. De lire tout ce qui va arriver comme si nous ne savions rien de l'avenir. Pour autant, notre esprit de lecteur du XXIe siècle aguerri à la SF ne peut se départir d'un certain nombre de rouages qu'il connait. Ce va-et-vient schizophrénique entre ce que l'on accepte comme vrai et ce que l'on sait être faux offre un roman à plusieurs niveaux dont il y a toujours un tiroir à ouvrir. C'est sur ce principe des multiples rouages cachés puis découverts que joue Félix J. Palma. Et c'est ce principe là qu'il manie, me semble-t-il, avec une dextérité pas toujours égale. Il montre parfois une belle qualité à la limite du virtuose et parfois, on a envie de lui dire que tout est trop toc pour que même avec la meilleure bonne volonté du monde, on y croit un quart de seconde. C'est vraiment le souci que j'ai eu avec la seconde partie. Tout m'a paru extrêmement mauvais. Je ne sais pas si ça vous est déjà arrivé en lisant un livre d'avoir l'impression que les personnages jouent mal ? Et bien, c'est ce que je me suis dit. Mêmes les dialogues étaient en papier mâché. Non vraiment, cette partie n'était pas bonne du tout.
Par contre, j'ai lu sur divers blogs que, pour beaucoup, la troisième partie était longuette et ennuyeuse, usant de trop de digressions. Pour moi, c'est tout le contraire : c'est la meilleure du roman ! (Comme quoi, la lecture est définitivement subjective) C'est dans celle-ci que l'auteur lève enfin le rideau et rend à César ce qui est à César. Même si je n'ai pas tout aimé, je ne peux que reconnaître ce retour aux sources de la SF auprès de Wells qui avait pour but de faire réfléchir les hommes sur l'utilisation présente de leurs inventions et sur leur nécessaire responsabilité à l'avenir. C'est aussi dans cette partie que l'auteur point derrière le narrateur et dévoile la mécanique de l'oeuvre. Est-il Wells au fond ? Y-a-t-il un nouveau tiroir à tirer ou bien est-ce la pirouette finale ?
Pour conclure, on peut dire que ce roman a rempli son objectif dans la mesure où il m'a donné envie de plonger dans les oeuvres de Wells que je n'ai jamais lues ! J'ai d'ores et déjà embarqué The Time machine sur mon kindle.
Par contre, il ne l'a pas rempli s'il s'agissait de me plonger dans un monde et dans un roman entre la fascination et le rire car ni l'un ni l'autre n'étaient au rendez-vous pour moi.
Comme j'ai pu constater qu'il avait fait craquer beaucoup de bloggeuses en librairie, j'espère que vous aurez plus de chance que moi à sa lecture !
Challenge "A tous prix" chez Laure
Grand prix du roman Ateneo de Séville
Le mois anglais chez Lou et Titine
4eme participation
Challenge Petit Bac 2013 chez Enna
Catégorie Objet
08:55 Publié dans Aventure, Challenge, Littérature hispanique, SF/Fantasy | Lien permanent | Commentaires (12)
21/06/2013
Rock'n'Swap : Le grand déballage !!
Oyez, Oyez, bande de rockeuses !
Aujourd'hui, c'est l'été ET la fête de la musique, deux excellentes raisons de mettre un peu de rock à fond et de déballer nos colis de swap !
J'espère que vous vous êtes toutes éclatées à réfléchir à vos cadeaux pendant presque deux mois et que la réception de votre paquet vous a tout autant mises en ébullition !
Allez hop, maintenant, on les découvre dans la joie et la bonne humeur !
On commence par les paquets de nos deux binômes courageux :
Tiphanie et Sybille
Choco et Cécile
Pour ma part, j'étais en binôme avec ma copine et co-organisatrice, Manu. Et comme c'était prévisible, ça a encore été un SUPER partage ! ♥ On n'a pas traîné pour s'envoyer nos colis, toutes frétillantes qu'on était à l'idée de se faire découvrir mutuellement nos trouvailles. Des vraies gamines, j'adore ! C'est moi qui ai reçu le colis en premier (malgré un envoi antérieur au sien, mais la poste française hein... gnii) Bref, pile poil pour bien commencer le week-end et le mois de juin, j'ai ouvert un grand carton qui contenait tout ça : (Manu, c'est une grande malade, moi j'vous l'dis ! Ou plutôt une binôme en or, c'est au choix^^)
Ni une, ni deux (ambiance "retour en enfance quand on trouve les cadeaux au pied du sapin"), j'ai déballé et découvert ça :
Le colis devait contenir deux livres, un coup de coeur et un livre rock et j'en ai reçu pas moins de quatre !!
Dans le thème de notre swap, Manu a glissé le fameux livre que j'avais repéré chez Rivages Rouge : Fargo Rock City de Chuck Klosterman, sous-titré "confessions d'un fan de Heavy Metal en zone rurale". GE-NIAL !! Quand on connait mon petit péché musical et mon lieu de résidence, il était évident que ce livre était fait pour moi ! Merci Manu de me permettre de le découvrir !
Dans la rubrique coup de coeur, elle m'a glissé Auprès de toi toujours de Kazuo Ishiguro, un auteur et un titre que je ne connais pas du tout et dans lequel je vais rapidement plongé avec plaisir ! Le portrait de Dorian Gray d'Oscar Wilde, un grand classique anglais qui l'a beaucoup marquée et dont elle a noté la lacune dans ma culture littéraire. A corriger très vite ! Et enfin, une découverte écrite par Tim Burton, La triste fin du petit enfant huître qui me rend très curieuse.
Le colis devait également contenir un CD ou DVD rock et Manu a décidé de me faire faire un voyage dans le temps cinématographique avec Rock of Ages d'Adam Shankman, l'adaptation de la comédie musicale de Chris d'Arienzo. Il raconte l'histoire d'une jeune fille qui tente de percer à Hollywood à travers les plus grands tubes rock, youhou !J'ai plus que hâte de passer une bonne soirée bière & pop corn devant ! (Erratum : ça y est, vu et bien rigolé ! Tom Cruise en pseudo Axl Rose, ça vaut son pesant de cacahuètes!)
Et en matière de surprise, Manu s'est déchirée en dénichant un super mug Iron Maiden (tout en bon goût et en subtilité comme vous pouvez le constater, hihi ! vive le Heavy Metal!), un stylo rouge à lèvres (attention aux apparences!), un porte-clé guitare estampillée Union Jack et un super marque-page "Keep Calm & Keep Reading". Je ne peux qu'adhérer à 100% à ce conseil !
Et puis un swap n'est pas un swap sans gourmandises à grignoter en lisant ! Manu a donc glissé (dans un grand souci de ma ligne, spice de coquinoute :p) une barre chocolatée anglaise (engloutie depuis longtemps), des shortbreads écossais (idem hein, c'est TROP bon !!) et de la pâte à tartiner au chocolat Côte d'or (comment ai-je pu ignorer que ça existait pendant si longtemps ?! Je ne risque plus de l'oublier, ça c'est sûr !!). Et pour faire glisser le tout avec délicatesse, du bon thé noir vanille-caramel !
Merci mille fois, Manu, pour ce colis fantastique, toutes ces petites attentions toujours inspirées. Et merci pour nos partages réguliers ! ♥
Par ici pour voir le colis que je lui ai envoyé à mon tour !
Merci à toutes les participantes d'avoir donné vie à ce swap. Même si on était peu nombreuses, on a bien kiffé quand même ! Je vous laisse avec une chanson qui met de bonne humeur et qui résume bien l'esprit rock qui me plait. Keep calm & Rock on !
08:00 Publié dans Swap | Lien permanent | Commentaires (24)
20/06/2013
Voler! du moine JAEYEON
Voler! du moine JAEYEON et illustré par Kim Sehyeon, traduit du coréen par Lim Yeong-Hee et Françoise Nagel, éditions Philippe Pïcquier, 2009, 156p.
Voler! est de ces paraboles initiatiques pleines de lumière dont les spiritualités du monde entier ont le secret.
Pilou est un jeune caneton d'élevage. Chaque midi, il part s'ébrouer à la rivière au son clinquant d'une boîte de conserve et il rentre de même le soir avec sa tribu docile. Pilou et les siens ne savent pas voler et se contentent de vivre cerclés d'une haie. Pourtant, Pilou rêve de s'élever dans les airs. Il n'y a aucune raison utilitaire à cela puisqu'il est déjà nourri et est dans une vie confortable bien que recluse. Il veut voler, simplement, comme ces canards sauvages qu'il voit migrer. Tel est le rêve fou de Pilou.
Afin de le réaliser, il s'échappe un jour de son élevage. Oh, ce n'est pas difficile puisqu'aucune barrière n'empêche la sortie ! Mais dès lors que sont loin les entraves rassurantes de la captivité commence une vie faite d'errance, de solitude et de questionnements pour cheminer vers son rêve. Au fil de ses pérégrinations, Pilou va croiser plusieurs personnages étonnants qui, chacun à leur manière, vont le guider sur la voie de l'envol jusqu'à ce qu'enfin, il puisse revenir vers les siens à travers ciel.
Vous l'aurez compris, Pilou, c'est le rêveur en chacun de nous. Bien souvent nous l'oublions et nous devenons comme ce vieux canard qui a trouvé la voie de la sérénité en faisant le deuil de ses aspirations profondes. Parfois, nous croisons aussi des esprits dogmatiques et froids qui nous imposent une foi qui n'est pas la nôtre, comme ce vieux héron qui veut imposer son savoir au lieu de le laisser fleurir dans le coeur de l'élève.
Mais Pilou nous rappelle que les rêves sont ce qui nous consituent, ce qui nous fait avancer et l'auteur profite de ce cheminement en la forêt de l'être pour incarner plusieurs grands principes bouddhistes : la méditation, la concentration, l'ascétisme, la solitude, la persévérance, la liberté et bien sûr l'amour. Le chemin de sa propre réalisation n'est pas un parcours de santé, d'après le moine Jaeyeon. Les embûches et parfois la souffrance sont nécessaires. Elles affinent, aiguisent et recentrent. Mais ce n'est pas que cela non plus car l'être apprend à s'ouvrir à chaque particularité du monde et développe une profonde acuité - comme Pilou peut sentir chacun de ses vaisseaux sanguins lorsqu'il bat des ailes.
Ceux qui me connaissent savent que j'ai quelques accointances avec les spiritualités asiatiques, aussi j'étais une lectrice plutôt conquise d'emblée par le propos du joli récit que voilà. Il y a beaucoup de vrai dans cette quête de soi au-delà des chaînes de la société. J'ai néanmoins toujours un peu de mal avec ce ressassement de l'ascétisme nécessaire ici un peu trop appuyé à mon goût. Ce n'est certes pas complètement faux mais, si la solitude et les entraves sont toujours l'occasion d'un enseignement fructueux s'ils se présentent, ils ne me semblent pas pour autant primordiaux pour cheminer. Et quand bien même ce serait le cas, je préfère aller moins loin dans la joie que peiner comme un pauvre diable tout seul en haut de ma montagne de sagesse.
Malgré ce petit bémol, Voler! est un conte délicat qui fera une très belle introduction à qui veut s'initier à la sagesse bouddhiste ou à qui veut entamer une marche intérieure.
Bonne route - ou devrais-je dire, bon vol !
Oiseaux de Judit Reigl, encre de chine, 2011
Lu en lecture commune avec Coccinelle pour clore en beauté son printemps coréen
C'est par ici pour voir son billet !
09:00 Publié dans Challenge, Contes, Lecture commune, Littérature asiatique | Lien permanent | Commentaires (6)