30/08/2016
Le livre de la jungle de Rudyard Kipling
Le livre de la jungle de Rudyard Kipling, Folio, 2010 [1899], 215p.
Première surprise : Le livre de la jungle, c'est l'histoire de Mowgli, mais pas seulement ! Point de roman ici mais un recueil de nouvelles aventureuses au cœur de grands espaces naturels.
L'histoire que nous connaissons du petit d'homme couvre les trois premières nouvelles. Où l'on retrouve sans surprise la tribu libre des loups, l'adoption de Mowgli, surnommé ainsi car il ressemble à une grenouille sans poils, après la tentative d'enlèvement par Shere-Khan et l'enseignement du code de la jungle par Baloo et Bagheera. Ce qui est beaucoup plus étonnant pour qui, comme c'était mon cas, ne connait que la version animée de Disney de cette histoire, c'est la personnalité des personnages. Mowgli fait preuve d'une grande maturité, d'une force de caractère incroyable, non sans une forme de très (trop?) grande confiance en lui parfois. Mowgli est le héros solitaire par excellence du haut de sa dizaine d'années, rejeté à la fois par les loups puis par les hommes (ce que Disney ne montre pas, évidemment). Baloo, quant à lui, n'a rien du paresseux un peu frivole et heureux de vivre. C'est la figure du sage dans toute sa splendeur, calme mais sévère lorsqu'il le faut. Il n'hésite pas à frapper Mowgli si celui-ci ne se montre pas assez sérieux dans son apprentissage par exemple. De manière générale, il y a quelque chose de plus consistant, de plus dramatique et aussi de plus corseté (un deuxième effet kiss cool de l'époque victorienne?) dans ce Livre de la jungle original que dans sa version aimée.
Deuxième surprise : Toutes les nouvelles ne se situe pas dans la jungle! "Le phoque blanc", la quatrième nouvelle, raconte la vie et les pérégrinations d'un phoque blanc (étonnamment) pour trouver enfin un refuge sans homme. Il parcourt ainsi toutes les eaux de la planète entre un repos à la pointe de l'île Saint Paul qui appartient à l'Alaska.
Autant être claire : je n'ai que peu de choses à dire sur les nouvelles qui ne concernent pas Mowgli pour la simple et bonne raison qu'elles me sont vite tombées des mains. Le style de Kipling est intéressant, c'est indéniable. Il y a une vivacité très orale et visuelle qui émane de son écriture et on sent sourdre la culture indienne dans la plupart des textes à travers quelques trouvailles stylistiques savoureuses. Pourtant, dès que nous avons quitté Mowgli, son histoire de phoque blanc et autres personnages divers m'a totalement perdue. Dans ma tête, à tort mais c'est ainsi, Le livre de la jungle, c'est l'histoire de Mowgli. Le reste, honnêtement, m'a semblé concerner un autre livre que je n'avais pas présentement envie de lire.
En lecture commune improvisée avec Cryssilda : allons voir son billet !
Challenge A Year in England chez Titine
13ème participation
08:00 Publié dans Aventure, Challenge, Classiques, Littérature anglophone | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : livre, jungle, livre de la jungle, mowgli, baloo, bagheera, sagesse, kipling
27/08/2016
Les échecs de l'été
Une fois n'est pas coutume, et peut-être parce que cet été aura été particulièrement riche en livres qui me sont tombés des mains, j'ai décidé de garder la trace d'un petit florilège de mes échecs.
Je sais qu'il y a eu dernièrement (et ce n'est pas la première fois) une polémique sur l'intérêt de chroniquer un livre qu'on n'a pas aimé et, a fortiori, un livre qu'on n'a même pas fini. Après tout, sur quoi se base-t-on pour émettre un jugement (forcément péremptoire) si l'on n'a parcouru que le tiers, le quart voire le dixième du livre ? Que cela plaise ou non aux auteurs, je suis persuadée (et c'est d'ailleurs comme ça que fonctionnent beaucoup de critiques et d'éditeurs, je n'ai donc pas inventé le concept) que le style et le propos d'un livre se cernent assez rapidement entre les premiers chapitres, et quelques autres pages prises au hasard. On saura vite si on a affaire à un bon roman, un grand roman, un chef d'oeuvre intersidéral, un ovni (et je classe dans cette catégorie les livres qui me laissent toujours dubitative au début de la lecture, ceux dont je ne sais quoi penser - dans ces cas-là, je poursuis toujours), un roman médiocre, un roman commercial, un roman déjà écrit cent fois et/ou un roman surfait. Ce n'est sans doute pas infaillible, évidemment. C'est sans doute aussi pétri de subjectivité. Mais à partir du moment où cette subjectivité est bonne à dire lorsqu'elle est positive, l'inverse doit être également valable.
Partant de cette idée, je me dis qu'un partage des romans interrompus peut représenter autant d'intérêt que le partage d'un coup de cœur. En tout cas, pour ma part, je suis très curieuse d'échanger au sujet de ces échecs, afin de saisir ce que j'ai peut-être raté, de me sentir aussi moins seule dans mon ennui ou mon agacement face à certains ouvrages, et/ou, pourquoi pas, me faire changer d'avis et m'inviter à repartir du bon pied avec un livre rencontré au mauvais moment.
*
Les singuliers d'Anne Percin, Le Rouergue, 2014, 393p. (J'ai constaté en librairie avant-hier qu'il venait de sortir en poche chez Babel.)
Que de promesses pour ce roman épistolaire qui plonge son lecteur au cœur d'une communauté artistique de la fin du XIXème, entre le fantasme (Hugo Boch et Hazel sont, entre autres, des mirages de l'auteure pour mener à bien son processus narratif) et la réalité (où l'on croise un Gauguin truculent, jouisseur et l'image d'un Van Gogh déjà évanescent, insaisissable). Le roman se veut la peinture bouillonnante d'une fin de siècle en pleine création et mutation : la peinture ne cesse de se renouveler, la photographie et la Tour Eiffel deviennent les symboles de la technologie faite art, les femmes commencent à être acceptées en écoles d'art et, dans tout ce tourbillon, les voyages forment toujours le mieux les artistes. C'est bien souvent du côté de petits villages perdus de la Bretagne d'Hugo Boch devise sur le monde, ses amis, l'inspiration, laissant deviner au lecteur une communauté éclectique et passionnante.
Connaissant mon amour de l'art, de la peinture en particulier et de la peinture du XIXème encore plus précisément, connaissant une certaine accointance pour l'épistolaire depuis un certain chef d'oeuvre du genre que je place au panthéon des miracles de la littérature, ce livre était fait pour moi à condition d'être à la hauteur des deux domaines sus-mentionnés - ce qui ne fut pas le cas, vous le voyez venir : entre une correspondance cousue de fil blanc (quoiqu'à ce stade-là, on frise le fluo) à laquelle on ne croit pas trois lettres et des propos sur l'art d'une banalité déconcertante, j'ai réussi à m'acharner sur 200 pages très molles avant d'abdiquer face à la platitude du style et l'inexistante profondeur du propos. Certains morceaux sont doux, plein de bonnes intentions, et parfois, pas trop mal vus mais l'ensemble est malheureusement trop lisse et trop superficiel à mon goût. Ecrire un livre sur la création artistique en se contentant de collectionner les clichés ne peut me convenir. Ce n'est pas désespéramment mauvais, non, c'est simplement médiocre - et je ne sais pas si c'est beaucoup mieux, en fait.
Le grand marin de Catherine Poulain, L'Olivier, 2016, 368p.
Je ne vais pas vous faire l'affront de résumer l'histoire de ce roman, parce qu'en toute honnêteté, je ne m'y suis pas acharnée très longtemps (beaucoup moins longtemps que le livre d'avant par exemple). Du coup, je ne sais même pas véritablement de quoi ça parle, à part ce que j'en ai lu dans les revues critiques et sur les blogs. Ce qui m'a par contre franchement marquée dès les premières pages, c'est l'incompréhension totale que j'ai ressenti lorsque j'ai attaqué le bouquin, pleine d'enthousiasme à la lecture des éloges démentiels qui en avaient été fait. Sans tourner autour du pot ni faire des courbettes diplomatiques, j'ai tout bonnement trouvé le style de Catherine Poulain d'une nullité limite insultante pour le lecteur et ce qu'elle racontait pas beaucoup plus élevé. Or quand je vois tous les prix que ce roman a glanés, tous les avis positifs qu'il a suscités dans des revues ou sur des blogs que je sais exigeants dans leurs lectures, je me dis que j'ai dû louper une marche, me planter de bouquin, ou faire une indigestion de champignons hallucinogènes. Avis à tous les lecteurs du Grand marin donc : qu'avez-vous trouvé au style (qui, définitivement, m'est rédhibitoire - non, en fait, vraiment, je le trouve insultant), à l'histoire ?! Ou inversement, y-a-t-il des lecteurs déconfits qui ont fait le même constat d'échec agacé que moi ?
Le huitième livre de Vésale de Jordi Llobregat, Le cherche midi, 2016, 620p.
Rien de tel, lorsqu'on est en panne estivale de lecture, qu'un bon thriller un poil obscur, historique, érudit et, qui sait, peut-être un peu ésotérique. En repérant ce roman sur le site du Cherche Midi qui mentionnait une comparaison avec Carlos Ruiz Zafon, j'ai immédiatement pensé à Marina que j'avais fort apprécié. Communauté linguistique oblige, j'ai aussi beaucoup pensé à José Carlos Somoza dont je dévore chaque ouvrage. Bref, ce roman devait me réconcilier avec le plaisir de dévorer avidement des centaines de pages en une après-midi, ce qui m'a décidé à le demander en SP (une fois n'est pas coutume).
Et là, c'est le drame... La scène d'ouverture, découverte d'un corps non identifié, presque irréel et donc censé être hautement flippant, est à la limite du risible. Soit, une plantade arrive et la tentation du cliché, dans ce genre littéraire, n'est jamais loin. Il faut savoir accepter de passer outre certaines facilités pour se laisser embarquer (oui, je suis faible, parfois). Poursuivant, donc, je découvre que les chapitres suivants dévoilent un personnage clé successivement, et l'histoire est ainsi vue alternativement par tel ou tel regard - regard qui perpétue malheureusement le cliché sus-mentionné : qui, le tout jeune professeur d'université à qui tout sourit mais qui reçoit une lettre le ramenant sur les traces de son passé (suspeeeeeeens), qui le journaliste pouilleux, endetté jusqu'à la moelle, risée de son journal mais qui cache, en fait, un scoop en or massif qu'il ne peut pas tout de suite dévoiler (ouh ouuuuuh), qui un personnage mystérieux dont la noirceur frise en fait le satanisme de farces et attrapes (depuis que beaucoup trop d'auteurs se sont amusés avec). Bref, on en revient aux ficelles fluo que j'évoquais tout à l'heure chez Anne Percin, à la différence près que j'ai trouvé ici une prétention narrative pas du tout en accort avec le mauvais style de gare effectif de l'auteur. Cette prétention fallacieuse a achevé de me rendre le bouquin carrément détestable. Anne Percin avait le mérite d'être d'une sincérité humble dans ses mots. Ici, jordi Llobregat semble persuadé d'avoir inventé la poudre alors qu'il écrit, à tout casser, un mauvais thriller déjà écrit cent fois, pompeux, ennuyeux et téléphoné.
Je m'excuse auprès du Cherche Midi qui a eu la gentillesse de me faire parvenir ce roman pour cet avis virulent et sans aucune nuance. Ça ne m'arrive pas souvent de trouver un livre à ce point mauvais mais quand c'est le cas, je préfère ne pas tourner autour du pot.
*
Quelqu'un parmi vous a-t-il lu l'un de ces trois romans ? J'attends vos avis divers et variés - plus pondérés, mitigés, aussi virulents que moi, dubitatifs, tranchés, opposés, passionnés, à paillettes ? - pour enrichir mes propres lectures !
16:12 Publié dans Divers, Littérature anglophone, Littérature française et francophone, Littérature hispanique | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : le grand marin, les singuliers, le huitième livre de vésale, livre, livres, vésale, peinture, xixème, gauguin, van gogh, hugo boch, boch, lili, marin, jordi llobregat, catherine poulain, anne percin, l'olivier, cherche midi, rouergue, thriller, prix littéraires
17/08/2016
5 ans, presque à la trappe !
Pour la première fois, j'ai failli louper l'anniversaire du blog ! Je ne peux même pas arguer être trop occupée : comparé à l'an dernier, en plein travaux pré-emménagement, je n'en rame pas une ! Il faut croire que c'est un signe que les dates et les rituels, qui jadis avaient tant d'importance, partent peu à peu à vau-l'eau.
C'est sans doute aussi le signe que je suis, en ce moment, dans une panne de lecture assez formidable. L'envie de bloguer est donc nécessairement peu présente. Rien de grave : je crois que c'est la panne de lecture annuelle de l'été. Je n'en avais aucune conscience avant de l'évoquer avec une amie mais, effectivement, tous les mois d'août semblent être des déserts littéraires de Gobi pour moi... Non que je ne lise rien mais absolument tout me tombe des mains, du roman médiocre qui accumule les clichés au roman virtuose qui a beau être génial n'en est pas moins ennuyeux à la longue... Résultat, j'ai actuellement un nombre impressionnant de livres en cours (ce qui ne m'arrive jamais d'ordinaire), tous plus au moins laissés en plan, sans réussir à trouver quelque chose qui me remette en selle. Mais si j'en crois le passé, la rentrée des classes fera le travail pour moi... Suis-je donc la seule à avoir une période annuelle de lecture qui fout le camp ou bien ? Racontez-moi tout !
En attendant, une sixième année est entamée depuis le 12 août dernier. Je ne pensais pas arriver un jour à cet âge canonique pour un blog. Je ne pensais pas tenir la longueur, je ne pensais pas ne pas me lasser. Bien sûr, tout évolue (j'en oublie même la bonne date d'anniversaire cette année) mais c'est toujours là et c'est ça qui est un peu fou ! Le plus chouette dans l'histoire, c'est que ça marche toujours sans me mettre aucune contrainte, ni objectif, ni pense-bête je ne sais où. Simplement par plaisir renouvelé d'écrire, d'entretenir un poil d'esprit critique sur la littérature et, évidemment, par plaisir renouvelé de partager, de lire et de vous lire. La raison d'être du blog est toujours là, donc, même si plus dilettante à l'occasion. Je repars donc avec le sourire pour une année supplémentaire !
11:46 Publié dans Divers | Lien permanent | Commentaires (20)