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01/08/2012

Manazuru de Hiromi Kawakami

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Manazuru de Hiromi Kawakami, traduit du japonais par Elisabeth Suetsugu, ed. Picquier Poche, 2012, 288p.

 

Des années après la disparition de son mari Rei, Kei se laisse porter par la vie comme une petite barque sur le grand océan. Présence douce, aimante, mais béante, elle habite avec sa mère, sa fille adolescente qu'elle ne comprends pas toujours, et entretient une relation adultère avec Seiji. Elle écrit, aussi. Qu'est-il advenu de Rei depuis plus de dix ans, parti un beau jour du domicile pour ne plus jamais reparaître ? Personne ne le sait.
Pour une raison qu'elle ignore, elle est guidée par une ombre amie vers Manazuru. Une première fois puis plusieurs autres. Cette station balnéaire japonaise semble être la clé de sa quête de compréhension, de son deuil de Rei - du détachement, du lâcher-prise.

La quatrième de couverture parle d'une "romancière de l'invisible, attachée à l'énergie ensorcelante des petites choses du quotidien" et de fait, il s'agit bien de cela. Apparemment, rien ne se passe dans ce roman si ce n'est quelques allers-retours à Manazuru, quelques discussions entre les personnages. Tout se passe à l'intérieur, dans les actions modestes et insignifiantes du vivre - c'est dans cet espace où Kei, progressivement, chemine.
Hiromi Kawakami articule brillamment en outre à ces scènes du banal les ficelles du fantastique - ce glissement progressif, étrange et subtil.
J'ai été touchée et portée agréablement par cet ouvrage qui se médite plus qu'il ne s'avale. Je ne l'encenserais point pour autant, ayant peut-être peiné un peu sur la durée à cause d'une écriture trop blanche, trop simple à mon goût et des scènes parfois peu passionnantes. Dans le même genre de romancière de l'invisible, je préfère définitivement l'écriture plus virtuose et poétique de Virginia Woolf. En somme, un joli roman à la fois doux et mélancolique, une pause aérienne et méditative dans le paysage serein des vacances estivales.

 

Merci à Aurore* douce pour cette découverte dans mon swap de l'été !

 

 

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18/07/2012

Bellefleur de Joyce Carol Oates

Les grandes vacances : l'instant de toutes les folies. Où l'on ose ce qu'on oserait pas en période scolaire parce que peur de ne pas avoir le temps et l'esprit suffisamment disponible. C'est donc l'instant, chers amis lecteurs, que j'ai choisi pour me lancer dans la sorte de pavé qui me fait d'ordinaire frémir les bouclettes - les vrais bons gros pavés (pas les riquiqui à la Zola) qui pourraient à l'aise Blaise caller le buffet branlant chez mémé : les pavés de près de 1000 pages.

 

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Bellefleur de Joyce Carol Oates, ed. Stock, 1981 - ed. Le livre de poche, 2012, 970p.

 

Comme vous le savez, je commence généralement mes chroniques par un résumé de l'oeuvre, ou tout du moins, de son début car ordre est mère de toutes les vertus. Je suis pourtant bien embêtée pour suivre mon petit rituel avec cet ouvrage, que je trouve parfaitement "inrésumable". Je vous rassure tout de suite : n'y voyez pas là le signe d'une mauvaise appréciation, bien plutôt l'aveu d'une incapacité face à un roman à tiroirs, à échelles, à pas chassés.  Bellefleur déroule la chronique labyrinthique d'une famille haute en couleurs, cette famille si bien-nommée qui donne son titre à l'ouvrage. Elle débute avec l'arrivée de Jean-Pierre Bellefleur sur le sol américain au début du XIXe siècle. Plein d'aspirations, il va amasser un patrimoine terrien gigantesque que ses descendants durant tout le siècle vont tour à tour gérer, perdre, retrouver, refuser ou quitter. Parmi eux, quelques figures emblématiques se détachent et que l'on retrouvera régulièrement dans le roman : Leah, douce et magnétique, portée par sa fille Germaine, Jedediah le mystique, Bromwell le scientifique surdoué ou encore Jean-Pierre II, le tueur en série.

Ecrire une oeuvre de près de 1000 pages uniquement constituée d'épisodes disparates sans suite chronologique et avec une pluralité aussi conséquente de personnages, tel est le défi d'écrivain que s'est lancé Joyce Carol Oates il y a une trentaine d'années. Soyons clairs, c'est aussi un sacré défi de lecteur de s'y coller, sachant que ce n'est ni le suspens ni l'accroche viscérale à l'histoire qui nous feront tourner les pages. Malgré ce qui semble être un handicap au départ, j'ai été portée avec plaisir par ce roman parfaitement étonnant, que je ne pourrais comparer à aucun autre ni ranger dans aucune case. Il s'agit d'une chronique familiale certes, mais sans les ressors habituels du genre qui virent souvent au soap opera. L'écriture est à la fois truculente, incongrue et précieuse. On retrouve quelque chose de parfaitement suranné dans ce XIXe siècle ampoulé de manières, teinté bien souvent de gothique, de noirceur, d'étrangeté : bien des personnages trouvent la mort dans des circonstances toujours inexplicables et, sans jamais le dire, on lit entre les lignes, des apparitions de loups garous, de vampires, et de trolls. On retrouve aussi et heureusement, une grande modernité dans la structure fragmentaire de l'oeuvre, totalement elliptique et faussement hasardeuse, et le caractère fort de bien des personnages, aspirant avec ferveur à prendre en main une vie lestée par son Histoire.

Je ne sais si j'ai "bien vendu" l'ouvrage mais, une chose est sûre, je ne saurais assez vous encourager à découvrir cet étonnant objet littéraire (objet qui, me semble-t-il, est plutôt original dans l'oeuvre de Oates, non? Mes confuses, je ne peux pas l'affirmer n'étant pas connaisseuse de son travail en général)
Armez-vous cependant de patience et de suffisamment de temps libre pour ne pas vous le trainer trop longtemps. Perso, j'y suis depuis quasi un mois et j'atteins ma limite de plaisir sur un seul et même ouvrage. Au-delà, ça commence à me lasser, aussi bon soit le livre.

 

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Extrait :

 

"Bromwell sortir de sa légère transe en entendant résonner un klaxon tout près. Le bruit des Bellefleur, les "urgences" des Bellefleur - il ne pouvait pas se passer un jour sans qu'un ouvrier se blessât, provoquant l'excitation de tout le monde, sans que Leah rapportât de bonnes nouvelles (de l'un de ses voyages), sans qu'une dispute éclatât entre les enfants, sans que des amis, des relations d'affaires ou des parents leur rendent visite ; ou peut-être quelqu'un était-il simplement en train de tapoter le klaxon de la nouvelle Stutz-Bearcat, pour le plaisir de faire du bruit. "Ah, soupira Bromwell. Notre univers a commencé par une explosion d'une violence incommensurable... il est donc naturel que l'espèce humaine repose, pour ainsi dire, dans la violence... en d'autres termes, dans le mouvement." (p. 411)

 

 

13/07/2012

Pension Vanilos d'Agatha Christie

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Pension Vanilos d'Agatha Christie, 250p. 

 

 

Poirot est sur le cul (oui, parfaitement) : Miss Lemon, d'ordinaire si méticuleuse, vient de laisser trois fautes dans un courrier. Cela cache forcément quelque chose ! Et de fait, Miss Lemon est inquiète pour sa soeur Mrs Hubbard confrontée à d'étranges évènements sur son lieu de travail, la pension de famille de Mrs Vanilos : divers objets disparates, avec plus ou moins de valeur, sont dérobés depuis plusieurs semaines.
Hercule Poirot se rend sur les lieux et la jeune Célia Austin avoue rapidement sa kleptomanie. Pourtant, tout cela apparait trop simple au célèbre détective qui sent bien que se trame un danger plus sérieux. Il ne faut pas attendre plus d'un jour pour voir le couperet tomber : Célia est retrouvée morte, prétendûment par suicide mais réellement assassinée. Et ce n'est que le début d'une série qui va ronger la pension Vanilos.
Mais pas de panique, Hercule Poirot est sur le coup, avec le bon inspecteur Sharpe !

Dans la rubrique purement subjective, je prends toujours beaucoup de plaisir à fourrer mon nez dans un Agatha Christie depuis que j'ai décidé d'y revenir il y a quelques mois. Cela, c'est un fait. J'adore son ambiance surannée (tellement inscrite dans une époque que lue à la nôtre, certaines réflexions pourraient facilement être taxées de racistes ou passéistes, mais bon, c'est le jeu de lire des trucs tout vieux, ma pauvre lucette, il faut plus en sourire que s'en vexer), ses personnages types qu'on retrouve d'un livre à l'autre (la belle jeune fille qui fume lascivement pendant l'interrogatoire, le jeune héritier mystérieux et sûr de lui, la petite timide avec un balai vous-savez-où, l'étudiant un brin arrogant etc) et évidemment, le fameux détective moustachu, champion toute catégorie des héros belges.
Dans une rubrique un peu plus objective, je dirais que ce n'est pas le meilleur Agatha Christie. Les scènes d'interrogatoires où chacun est passé au grill m'ont paru plutôt ennuyeuses sur la durée, chacune n'apportant sur le moment rien de particulièrement neuf. Les déductions astucieuses de Poirot tombent ici un peu comme un cheveu sur la soupe : je sais qu'il est génial m'enfin de là à déduire tout un *biiiiiip* à partir d'un simple sac à dos lacéré, hmm... Sans aucun autre indice extérieur ? Ca semble plus relever du coup de bol monumental à partir d'une imagination débordante que de la déduction stricto sensu.
Mais bon, voilà, quelques reproches parce qu'il ne faut pas pousser trop loin mémé dans les orties ! Cela dit, Agatha Christie devait compter sur notre amour inconditionnel pour elle pour ne pas nous en formaliser et continuer à dévorer ses bouquins quoiqu'il arrive et vous savez quoi ? Elle a parié juste, c'est pas ça qui va me faire arrêter !

 

 

 

 

challange-agatha-christie.jpgChallenge Agatha Christie

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Classique-final-4.jpgUn classique par mois

Juillet 2012