28/11/2011
Les prix littéraires 2011 : Un pti récap' des blogs pour le plaisir
On s'y perd dans tous ces prix, on s'y perd. Et quand il s'agit de repairer ce qui a pu en être dit sur les blogs pour se faire un avis pré-achat, là c'est carrément la traversée de l'atlantique sans palme ni tuba.
Ca tombe bien, je suis passée pro dans la pratique du dos crawlé en haute mer (ouais, ok, la haute mer en question, c'est la piscine municipale mais chuuut), du coup, je me suis amusée à faire un petit récap bloguesque des prix littéraires.
PS : Si je vous ai oublié et que vous voulez apparaître pour l'un ou l'autre livre, faites signe :)
Grand prix de l'académie française :
Retour à Killybegs de Sorj Chalandon
Ce qu'en disent :
Clara : "Dans une écriture aux mots justes qui colle au plus près des émotions, Sorj Chalandon décrit la vie de Tyrone. Celle du militant et celle de l’homme. Tout en finesse et sans jamais prendre parti, il nous amène sur le terrain de la conscience, du poids de la trahison et de celle de l’amitié bafouée. Un grand livre !"
Emmyne : "L'emploi de ce Je narratif me stupéfie, me fascine. La qualité, la force, l'humanité de ce choix me frappent. Dès la dédicace : " A ceux qui ont aimé un traître ". La puissance de cette écriture reste un mystère pour moi, au-delà de cette sobriété du style pur et juste, au-delà de l'exigence et de la densité, au delà du mot toujours effectif, affectif, qui touche le lecteur parce qu'il touche si parfaitement le moment, l'image et les sensations."
Hélène (Cases à vent) : "C'est un roman extrêmement fort qui sur fond de combat de rues, de conflit religieux, d' opération semi-militaire nous parle d'amitié, d'amour de celui d' hommes et de femmes pour leurs prochains et pour leur pays."
Mara : "Dès les premières lignes, on sait que c’est du Chalandon. J’ai retrouvé avec bonheur son style, c’est comme retrouvé un ami que l’on avait perdu de vue. Ses mots, ses phrases font mouche"
Mirage : "Il a le don de faire ressortir la beauté de chaque geste et non seulement de faire vivre sous nos yeux les scènes mais de nous transporter la-bas, en Irlande. Ses phrases, ses mots sont magnifiques. On en ressort troublé et on les relit, encore et encore toujours avec le même bonheur."
A propos des livres : "Voilà un livre très fort, qui m'a bouleversée.."
Constante93 : "Sorj Chalandon affirme avec Retour à Killybegs sa capacité à partager l’émotion par la littérature. Son écriture est sensible, parfois douce, drôle ou vivante, parfois dure et désespérée. Les émotions se ressentent avant même d’être comprises, et la beauté réside peut-être au milieu de toute cette humanité que l’on percoit au sein même de l’écriture"
Nina : "L’écriture de Chalandon est splendide, et je commence à comprendre pourquoi on parle autant de lui et pourquoi ses nouvelles parutions font un tel foin chez les libraires. Il a réussi à m’intéresser à un personnage que j’aurais du haïr, c’est énorme. Et d’ailleurs j’ai eu énormément de mal à entrer dans le roman. Mais après, je ne pouvais plus le lâcher. Je vous en conseille absolument la lecture, mais prévoyez des mouchoirs !"
Enna : "C'est passionnant, c'est poignant! Je n'ai pas pris parti en lisant ce roman mais on comprend les états d'âmes de cet homme qui est loin d'être linéaire. On apprend aussi beaucoup de choses à charge et à décharge sur l'IRA."
Prix Goncourt :
L'art français de la guerre d'Alexis Jenni
Ce qu'en dit :
Valérie : "Mais si ce roman parle de guerre, il parle aussi d'amour [...] Malgré tout, je me suis forcée à aller au bout de ce pavé (plus de 600 pages grand format, c'est à dire plus grand que le dernier Foenkinos par exemple) mais ce fut pénible pour moi car je n'ai, à aucun moment, ressenti une quelconque émotion. "
Prix Renaudot :
Ce qu'en disent :
Clara : "Dans ce livre, Emmanuel Carrère démontre une fois de plus son talent hors-pair de narrateur. Et, il s’agit d’un livre fourni , brillant, très intéressant et où aucun détail n’est laissé au hasard ! "
Mathilde : "Je suis une adepte assez inconditionnelle du travail d’Emmanuel Carrère. Son écriture est simple, limpide"
Valérie : "Je n'ai pas l'habitude de transformer mes livres en livre-hérisson mais j'y laisse plus ou moins de petits bouts de papier pour m'aider à retrouver les passages importants. Parfois, il n'y a aucun bout de papier, parfois beaucoup. Ce fut le cas pour ce roman. Et là, nous allons régler tout de suite la question de l'essai ou du roman. Sur mon exemplaire, on ne trouve pas le mot roman. Et en effet, ce n'en est pas un"
PetitSachem : "Ce livre est une biographie et n'en est pas une: à travers le parcours de cet écrivain atypique, politiquement incorrect, égocentrique mais très respectueux du peuple russe, c'est toute l'histoire de la Russie depuis la Perestroika qui défile sous nos yeux."
Hélène (lecturissime) : "Je pourrais vous dire qu’il faut croire les critiques et découvrir cet ouvrage, et je pense qu’il faut le faire si : 1. Vous appréciez les biographie 2. Vous appréciez l’histoire du communisme 3. Vous vous intéressez à Edouard Limonov 4. Vous appréciez Emmanuel Carrère. Sinon ? Il y a tant d’autres romans à découvrir…"
Achille49 : "Le style est brillant, la thématique passionnante mais toujours ces longueurs dans les textes et le plaisir de se scénariser absolument. Un vrai bon moment de lecture."
SD49 : "Durant de nombreux passages j'ai eu l'impression de lire un documentaire historique et politique, cela n'est franchement pas ma tasse de thé"
Prix Médicis :
Ce qu'aimer veut dire de Mathieu Lindon
Ce qu'en dit :
Tournez les pages : "« Ce qu’aimer veut dire », qui le sait? c’est la belle leçon de ce récit autobiographique. L’amour, l’amitié, les deux se croisent sans cesse et surtout échappent totalement aux règles et aux cadres strictes."
Prix Médicis étranger :
Une femme fuyant l'annonce de David Grossman
Ce qu'en disent :
June : "une grande déception pour moi, un ennui certain "
Agathe : "C'est un roman ambitieux que nous propose David Grossman, cependant, sa densité m'a effrayé et je n'ai pas pris autant de plaisir que je ne le pensais... Certains passages m'ont semblé inutiles et m'ont vite ennuyée... Dommage..."
Fleur de menthe : "Je suis tombée amoureuse d’un auteur et de son pouvoir sur les mots, de sa capacité à poser un ton sur une situation, un regard, aussi impalpables soient-ils…"
Prix Médicis essai :
Dans les forêts de Sibérie de Sylvain Tesson
Ce qu'en disent :
Caro : "Seul bémol (car il y'en a un quand même!): l'auteur donne parfois trop de leçons de moral. Ses sentences deviennent pontifiantes voire agaçantes.[...] Ce récit reste quand même une ode à la nature, au recueillement. Un livre magnifique! "
LittExpress : "Le propos est riche, poétique et le dépaysement total. Dans les forêts de Sibérie donne l’envie de se nicher dans sa propre cabane, loin des vicissitudes de notre temps en nous proposant un retour aux sources de la condition humaine."
LionelB sur Ecrivains et Voyageurs : "Il s’agit de l’un de ces livres qui permettent à chacun de nous de puiser un peu plus de force pour tenter de sortir d’une condition est peu trop conditionné"
Prix Femina :
Jayne Mansfield 1967 de Simon Liberati
Ce qu'en dit :
Des Livres émois : "Un récit haletant, bien écrit... Sobre, Simon Libérati connait bien le sujet (il en est même fan obsédé comme il le dit lors des interviews). Il aurait pu essayer de trouver les bonnes excuses à Jayne, sombrer dans l'hagiographie, il n'en est rien."
Sophie : "Malgré tout, j'ai l'impression d'être restée sur ma fin. Oui se roman se lit, non on ne passe pas un mauvais moment. En revanche, que vais-je garder de cette lecture ?"
Prix Femina étranger :
Dire son nom de Francisco Goldman
Ce qu'en disent :
Valérie : "Ce roman m'a rendue aussi mal à l'aise qu'Un Roman Russe d'Emmanuel Carrère où celui-ci réglait ses comptes avec son ex-femme. Ce qui est intéressant néanmoins est l'intinéraire de cette mexicaine pour laquelle sa mère avait une énorme ambition."
Nina : "Pour moi c’est un roman superbe, d’une douceur et d’une fragilité de plume. Un roman pour lequel il faut être un peu concentré, mais aussi par lequel on se laisse embarquer avec un plaisir énorme."
Prix Femina Essai :
L'homme qui se prenait pour Napoléon de Laure Murat
Ce qu'en dit :
Bernard Morlino : "Depuis les travaux de Michel Foucault, on n’avait plus lu un livre aussi intelligent sur la folie."
Prix Goncourt des lycéens :
Du domaine des murmures de Carole Martinez
Ce qu'en disent :
Antigone : "Ce qui est une qualité dans l'écriture de Carole Martinez me semble aussi en être une faiblesse potentielle. Aurais-je envie de lire un troisième roman de cette espèce ? Ce n'est pas évident."
Antoine et Violaine : "La plume envoûtante et inimitable de Carole Martinez a encore frappé."
Clara : "Il s’agit d’un roman magnifique, profond et intense ! Dans ce récit narré par Esclarmonde, Carole Martinez excelle sur les thèmes de la liberté et de la condition des femmes"
Constance93 : "Un magnifique deuxième roman dans lequel Carole Martinez s’impose par son univers et son écriture."
Garance : "J’ai vraiment beaucoup aimé ce livre. J’ai adoré suivre ce personnage atypique, découvrir cette époque de souffrances et de beauté"
Hélène (Cases à vent) : "Honnêtement c'est un roman qui me laissera un avis mitigé. C' est plutôt une déception malgré quelques points qui auront malgré tout réussi à me séduire. Je n'ai à aucun moment retrouvé la voix qui m'avait tant séduite dans son roman précédent."
Leiloona : "On ne peut que s'attendrir, admirer ou trembler. Et si l'on suspecte un joli travail de recherches pour écrire ce livre, il n'efface jamais la puissante voix de la conteuse."
Nina : "J’ai été déçue. Je ne sais pas trop dire ce que j’espérais, ce qui complique bien sûr l’explication de la déception, mais en fait je pense que je ne me suis pas intéressée à Esclarmonde, ni à son père, ni en fait à quasiment aucun personnage de l’histoire à part la dame de compagnie de Douce"
Géraldine : "Un livre très riche, plein de surprises"
Enna : "J'ai trouvé ce roman à la fois fort et plein de douceur. J'ai beaucoup aimé le style, très facile, fluide, poétique."
Liliba : "Laissez-vous enfermer avec Esclarmonde ! Vous subirez non les sévices et souffrances que doit endurer cette recluse volontaire, mais les délices de lire à nouveau la plume, ô combien magnifique ! de Carole Martinez."
Mirage : "j'ai complètement adhéré au style de l'écriture mais j'ai eue du mal à complètement rentrer dans l'histoire par des multitudes de détails légèrement dérangeants. Cela reste quand même un bon moment de lecture."
Canel : "A lire et relire pour savourer la plume."
A propos des livres : "Cette histoire se lit comme un conte, l'écriture est superbe, pleine de poésie et de beauté, je me suis laissée porter par la narration d'Esclarmonde"
Anne : "Cette part de ciel, dont l'enfer n'est jamais loin, nous est contée dans une langue précieuse et forte, limpide, avec un sens de la maîtrise et du récit, une richesse de documentation qui sait se faire discrète, un sens des personnages et une empathie qui touchent et souvent bouleversent"
Prix Renaudot des lycéens :
Rien ne s'oppose à la nuit de Delphine de Vigan
Ce qu'en disent :
Antoine et Violaine : "Encore une fois envoûtée par la plume de Delphine de Vigan, j’ai été bouleversée par ce livre."
Canel : "Je trouve la plume et les propos de Delphine de Vigan de plus en plus brillants, de plus en plus aboutis, "osés" (dans le sens le plus noble du terme) au fil de son oeuvre."
Hélène (Littérature et Chocolat) : "un livre poignant, dérangeant et courageux"
Clara : "Le terme de coup de cœur ne peut pas s’employer, ce serait un euphémisme. Un livre tout simplement magnifique. Sobre, sensible et tout en pudeur. J’ai vibré, j’ai été émue, j’ai pleuré..."
Hérisson : "ce livre est une belle perle de cette rentrée littéraire, qui donne envie de dire Je t’aime un peu plus…"
Jostein : "C'est un très beau roman, une performance d'auteur"
Leiloona : "Terriblement magnifique : à découvrir d'urgence"
Mango : "J’ai aimé que ce drame avant tout personnel et familial soit aussi étroitement relié à la vie sociale, politique et culturelle de son époque."
Mara : "Je ressort de cette lecture bouleversée, remuée, touchée,... C’est rien de moins qu’un coup de coeur"
Sophielit : "Le produit de tout cela est un roman massif mais pas effrayant ni inaccessible, sombre, effectivement, mais lumineux aussi, fascinant de justesse et de capacité d’observation, d’émotions maintenues à distance, à l’écriture mélancoliquement musicale."
Sophile57 : "De septembre 2011 restera cet été indien et le choc de cette lecture"
Pierre Darracq : "Disons-le tout net, j'ai vraiment apprécié "Rien ne s'oppose à la nuit" qui n'est sûrement pas un chef d'oeuvre de la littérature mais qui procure un plaisir de lecture immense."
SD49 : "Je dois bien avouer que pour moi cela reste plutôt du domaine de l'intime et c'est pour cette raison que cela me gêne. Cela fait un peu voyeur de ma part d'avoir lu ça. Et pourtant c'est le choix de l'auteur et je le respecte."
Valou : " Rien ne s'oppose à la nuit n'a pas fini de me revenir à l'esprit..."
Géraldine : "J'ai mis 4 étoiles tant ce livre est maîtrise et l'hommage rendu à la mère qui se bat magnifique. Mais il m'a sacrément remuée, voire parfois mise mal à l'aise."
Marianne : "Un très beau livre sur l’amour et le pardon d’une fille envers sa mère par-delà les douleurs et les non-dits"
Sharon : "Ce livre n’est pas un coup de cœur, il est un électrochoc."
Hélène (Cases à vent) : "Que ce livre est beau !
Je l'ai trouvé bouleversant par la pudeur et la tendresse qui déborde littéralement de toutes les pages."
Rose : "Un livre sombre, qui peut imprimer un moment de malaise dans cette plongée si profonde dans les méandres d’une famille qui n’est pas la notre, mais on ressent aussi et surtout un hommage, un cri d’amour de l'auteur pour sa mère."
Anne : "Un très, très, très beau livre (c'est pas original ce que je dis là), dont on ne sort pas écrasé (l'auteur a réussi à nous emmener jusque là, et a même parfois laissé la place au rire et à l'humour, même dans le tragique). Une belle surprise qui m'a cueillie au carrefour de l'intime et de l'écriture."
A propos des livres : "Un témoignage bouleversant, et un bel hommage de Delphine pour sa maman. C'était très courageux de la part de Delphine de mener à bien cet ouvrage et à sa famille d'accepter le portrait de Lucile par Delphine.
J'ai eu un vrai coup de cœur pour ce livre qui ne laisse pas indifférent"
Plume : "Ce roman est un récit intimiste, poignant, écrit dans un style fluide et agréable."
Sophie : "je vous conseille la lecture de ce roman !"
Mirage : "J'ai été vraiment ému par cette multitude de sentiments qui nous saisie l'âme, le coeur et qui ne nous laisse que les larmes pour pleurer."
09:00 Publié dans Challenge, Littérature française et francophone | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : prix littéraires
30/10/2011
La mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé
La Mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé, Actes Sud, 2002 ; Babel, 2004 ; Le Livre de Poche, 2006
Le puissant roi Tsongor, conquérant invaincu, prépare les noces de son unique fille Samilia avec le prince des Terres du Sel. Tandis que s'annonce le jour des cadeaux, un ami d'enfance reapparait après de longues années d'errance pour réclamer également sa main, arguant un serment d'enfance.
C'est la mort du roi, c'est la guerre fratricide et la destruction de la ville. Pendant ce temps là, le plus jeune fils de Tsongor, Souba, part honorer une promesse faite à son père afin de lui apporter le repos de l'âme.
Deuxième lecture d'un Gaudé et décidément, on ne peut pas passer à côté de l'empreinte puissante des tragédies mythiques et de l'épopée. Ici bien plus que dans La porte des Enfers, même. Les décors et les personnages sont des figures archétypales des mythes : La ville éclatante puis assiégée, le palais ; le roi puissant, le serviteur dévoué bien qu'ambigu, l'affrontement des jumeaux pour le pouvoir, le combat pour la femme aimée, la fatalité... Toutes les balises sont plantées, de même que l'écriture se revêt de cette forte inspiration théâtrale - les dialogues sont des déclamations tragiques - pour réécrire avec brio ces récits ancestraux où l'Homme fait son apprentissage.
Merci à ma petite tarte aux fraises pour ce conseil de lecture!
*
Extrait :
"Rassamilagh regarda longuement Danga. Sans haine. Mais avec distance.
- Je ne te connais pas, Danga, dit-il finalement. Nous sommes alliés par l'amitié que nous portons tous deux à Sango Kerim, mais ce n'est pas pour toi que je me bats. Que me fait à moi que ce soit toi ou ton frère qui règne sur Massaba? Ne l'oublie pas, Danga. Je ne fais rien pour toi.
C'est alors que Sango Kerim pris la parole.
- De quoi aurais-je l'air, Rassamilagh, si je partais cette nuit, emportant comme un voleur la femme que je suis venu chercher? Elle est la fille du roi Tsongor. Ce ne sont pas les sentiers nimades du désert que je veux lui offrir pour dot, mais sa ville reconquise. Elle ne saurait vivre ailleurs. Son père me maudirait entre ses dents de mort s'il apprenait que j'ai fait de son héritière une errante. Cette ville est à nous. Il n'y a pas de victoire si nous ne parvenons pas à la prendre.
- J'ai dit ce que j'avais à dire et je ne regrette pas d'avoir parlé, répondit Rassamilagh. Aucun de vos arguments ne me convainc. C'est le goût de la victoire que j'entends dans vos bouches. Je le reconnais. Mais je vois que je suis le seul à penser au départ. N'ayez crainte. Je resterai avec vous. Rassamilagh n'est pas un lache. Mais souvenez-vous de cette nuit où tout aurait pu s'arrêtez et priez pour que nous n'ayons jamais à regretter sa douceur de myrte."
08:41 Publié dans Littérature française et francophone | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : afrique, mort, épopée, tragédie, théâtre, tsongor, fatalité, mythe
21/10/2011
Rien ne s'oppose à la nuit de Delphine de Vigan
[Ante-Scriptum : Encore 2 semaines pour les inscriptions au swap de l'hiver si le coeur vous en dit! En plus, on est en nombre impair pour l'instant alors n'hésitez pas! Tous les renseignements ici et les inscriptions ici.]
Rien ne s'oppose à la nuit de Delphine de Vigan, JC Lattès, 2011, 437p.
La mère de l'auteur s'est suicidée le 25 janvier 2008. Elle lance alors son fol amour à la création du plus beau des tombeaux : celui de papier. Quelle femme était sa mère et quelle était cette souffrance?
Delphine de Vigan brosse avec une belle émotion dénuée de pathos le portrait de cette mère qu'elle met à distance avec un pseudonyme ("Quelques années plus tard, lorsque Lucile a écrit un texte sur Nébo, elle me l'a soumis pour relecture avant de l'envoyer, sous le pseudonyme de Lucile Poirier (Lucile, en quelque sorte, a donc choisi elle-même son nom de personnage"). Elle ne cherche pas à l'embellir mais à la montrer telle qu'en elle-même, estimant à juste titre que la franchise est le plus bel hommage à lui faire - Aussi, rien ne nous est épargné, bien qu'écrit avec pudeur, de son histoire et des affres de sa bipolarité.
Ponctué de réflexions de l'auteur sur sa démarche d'écriture et ses doutes, l'ouvrage offre en outre un regard permanent de ses coulisses et nous laisse à voir le livre en train de s'écrire.
J'avoue néanmoins avoir fini par m'essoufler au court de ma lecture. Bien que terriblement poignant et bien écrit, ce roman ne m'a pas transcendée littérairement parlant. Peut-être est-ce du au passage instinctif à la première personne dès lors que l'auteur nait dans la narration - cette composition entre biographie et autofiction m'a peu emballée par son manque d'originalité. De manière générale, c'est sans doute le classicisme de la forme et de l'entreprise sans renouvellement particulier - l'auteur, d'ailleurs, fait montre de lucidité sur ce point en début d'ouvrage - qui ne m'a pas totalement conquise au point de trouver l'ouvrage génial. C'est un bel hommage, écrit avec pudeur et amour et on en ressort, sans nul doute, profondément ému - et c'est déjà pas mal.
*
Extraits :
"A Pierremont, les voix finissaient toujours par monter dans les aigus, les portes claquaient, et au moment où l'on en venait presque aux mains, le minuteur en forme de pomme sonnait pour nous rappeler qu'il était grand temps de sortir le gratin du four.
A côté de nous, posée sur un tabouret, Lucile revendiquait son exception mutique et culinaire, n'avait d'avis sur rien, consentait parfois à éplucher quelques pommes de terre."
"Lorsqe j'ai su que Jours sans faim allait paraître, je lui ai donné à lire le manuscrit. Un samedi soir où elle devait venir chez nous pour garder nos enfants, Lucile est arrivée ivre, le regard dilué. Elle avait passé l'après-midi à lire le roman. Elle l'avait trouvé beau mais injuste. Elle a répété : c'est injuste. Je me suis isolée avec elle, j'ai tenté de lui dire que je comprenais que cela puisse être douloureux, que j'en étais désolée, mais il me semblait que le livre révélait aussi, si besoin en était, l'amour que j'éprouvais pour elle. Dans un sanglot, Lucile a protesté : ce n'était pas vrai, même au pire de la torpeur, elle n'était pas comme ça. Je l'ai regardé, j'ai dit : si.
Je ne lui ai pas dit qu'elle avait été pire, pire que ça."
Challenge 1% de la rentrée littéraire
7/7
09:49 Publié dans Challenge, Littérature française et francophone | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : rentrée littéraire, delphine de vigan, mère, biographie, autofiction hommage