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28/09/2012

Les rencontres de Chaminadour 2012

Vous me croirez, vous me croirez pas, chers lecteurs, mais il se passe parfois des évènements culturels intéressants en ce beau trou paumé qu'est la Creuse.

Outre quelques très intéressantes pièces de théâtre auxquelles j'ai l'intention d'assister (et dont vous entendrez parler, donc, une fois cela fait), se met également en place chaque année un festival littéraire d'un genre particulier intitulé Les rencontres de Chaminadour.

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Ainsi nommé en hommage à Marcel Jouhandeau, écrivain creusois, et à son roman éponyme, Les rencontres de Chaminadour déroulent durant trois jours tables rondes, lectures et rencontres autour d'un écrivain français. Cette session (qui prend place actuellement et jusqu'à dimanche) tourne autour de Sylvie Germain dont nous pourrons étudier tout un tas de questions cruciales et passionnantes telles que "la réinterprétation du mythe" ou "le mystère de l'enchantement".

Un genre de festival littéraire un peu particulier, je vous le disais car il s'apparente presque plus au colloque - une oeuvre précise ainsi décortiquée, à coup sûr, ne séduira pas forcément les néophytes de Sylvie Germain. Néanmoins, vous pourrez goûter à la place aux lectures ainsi qu'à la table ronde de demain matin intitulée "Métiers du livre". Ou tout simplement, profiter de cette occasion pour voir cequ'il se trame de beau dans la région !

 

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25/06/2012

Ce qu'il advint du sauvage blanc de François Garde

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Ce qu'il advint du sauvage blanc de François Garde, ed. Gallimard, Coll. Blanche, 2012, 327p.

Prix Goncourt du premier roman 2012

 

 

Imaginez l'angoisse de vous découvrir seul sur une île perdue et inexplorée. C'est l'émotion qui envahit Narcisse Pelletier lorsque, rentrant d'une marche dans les terres à la recherche d'eau potable, il s'aperçoit que tout l'équipage du navire sur lequel il est mousse est parti sans lui. Narcisse se rassure, se perduade qu'il apercevra à nouveau le bateau à l'horizon prochainement.
Il n'en verra plus pendant dix-huit ans.
C'est d'abord la solitude, la perte, la faim puis, plus terrible encore, la soif qui le torture.
Au bord de la mort, une vieille indigène le sustente dans un silence à la fois glacial et réconfortant puis Narcisse rejoint sur ses talons une tribu aux moeurs inconnues. Peu à peu, il comprend que cette tribu est la clé de sa survie puis de sa vie tout court et tandis que se décousent ses souvenirs de France et des mers, se tissent une nouvelle existence de sauvage blanc.

En parallèle de ce récit, nous lisons les lettres d'Octave de Vallombrun à l'adresse du Président de la Société française de Géographie. Jeune géographe aux velléités d'aventures, il n'a fait jusqu'ici que de piètres découvertes et s'est révélé de piètre constitution. Lors d'une soirée, il rencontre celui qu'on appelle le "sauvage blanc", recueilli par un navire anglais tandis qu'il ramassait nu des coquillages sur une île reculée. Il apparait que cet inconnu réagit aux sons de la langue française et c'est donc à Octave qu'il sera confié en vue d'être rééduqué à la civilisation et ramené chez lui. En vue, également, de faire avancer les connaissances scientifiques sur les tribus indigènes du Pacifique.

 

Ce qu'il advint du sauvage blanc est une sacrée surprise pour moi, fort peu attirée de base par les robinsonnades, et un sacrément bon premier roman (le Goncourt n'est pas volé). Toute la finesse réside dans cette construction narrative alternée qui développe ainsi une double évolution anthropologique : Déconstruire puis reconstruire - chaque fois en faisant appel à l'absolue nécessité de la survie.
Point en effet de récit sur une volonté de Narcisse d'imposer ses us et coutumes, ni auprès de la tribu qui le recueille, ni auprès d'Octave. A chaque nouvelle vie, il se dépouille, non sans difficulté mais avec une résignation intégrée, de sa peau précédente. Il se soumet aux exigences du vivre.
C'est le premier point que je relève de cette lecture : la pregnance du biologique, de l'instinct de survie sur tout autre considération. Avant tout des bêtes, faim et soif président à notre destinée où pudeur et phrasé abdiquent rapidement.

On saisit aussi grâce à cette alternance de propos toute l'incongruité de l'opposition civilisé/sauvage. Vivre nu sans pudeur ni confort marque-t-il la sauvagerie quand il marque aussi et surtout une adéquation à la nature et acceptation de l'autre et du présent ? La science, le progrès et la bonne volonté marquent-ils la civilisation quand il semble compliqué d'envisager la moindre différence comme valable ? L'auteur se garde bien d'apporter à ces questions des réponses trop simples et certainement pas plus convaincantes car aussi manichéennes que les certitudes du siècle dernier mais pose question à travers sa plume et l'expérience commune de Narcisse et Octave.

Enfin, je n'ai pas pu m'empêcher de sourire à la fin du roman lorsque point la petite réflexion sur le travail d'écrivain à travers un aphorisme de Narcisse. Tandis qu'Octave tente une ultime fois que lui faire raconter son expérience insulaire, il lui répond simplement "Parler, c'est comme mourir". Qu'en penser, alors, de l'écriture ?

Bref, un roman à plusieurs niveaux de réflexion, profond, ciselé, parfaitement écrit. Un plaisir de lecture comme un plaisir des neurones - bref, un roman comme j'aime à en découvrir !

 

06/06/2012

Mélusine ou la Noble Histoire de Lusignan de Jean d'Arras

Oyez, oyez, gentes dames et braves messires ! Approchez-vous prestement car, j'aime autant vous le dire, vous ne verrez pas ça tous les jours - ni même tous les mois - ni même tous les ans. Bref, vous l'aurez compris, c'est un truc de fou : votre humble servante littéraire s'est amusée à lire un roman médiéval ! La raison en est sa faiblesse aux conseils littéraires de tous poils, et sa curiosité en la matière (mais est-ce vraiment une faiblesse?) qui l'a décidée sur l'invitation d'une certaine jeune femme à replonger dans le Moyen-Âge (période littéraire que j'avais pourtant exécrée pendant mes études mais après tout, y a que les cons qui ne changent pas d'avis !)

 

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Mélusine ou la Noble Histoire de Lusignan de Jean d'Arras, ed. Le livre de poche, Coll. Lettres Gothiques (bilingue), Traduit, présenté et annoté par Jean-Jacques Vincensini, 2003, 819p. (dont plus d'une centaine d'introduction)

 

 

Reprenons-donc, chers lecteurs. On me conseille, on m'en fait des éloges, je suis faible et je loue donc à la bibliothèque. Globalement, ces découvertes sont toujours des lectures intéressantes même si j'en formule parfois une critique un poil acerbe parce que le principe même de m'ouvrir à d'autres horizons me plait. Il n'en reste pas moins qu'on ne change pas d'avis radicalement à tous les coups, vous en conviendrez. Et c'est ce qui se passe pour moi avec ce sympathique Mélusine de Jean d'Arras : Y a pas à tortiller, j'ai quand même un mal de chien avec la littérature médiévale.

 

Pour vous situer un peu le contexte : ce roman de Jean d'Arras daté de 1393 (et oui, on remonte loin hein) est la première occurrence littéraire de la fée Mélusine. L'ouvrage commence par remercier Dieu et le seigneur commanditaire, comme il était de bon ton de le faire, puis brosse l'ascendance de notre féérique protagoniste. Où l'on apprend qu'elle est fille du Roi d'Ecosse et de la fée Persina qui, après avoir donné naissance à ces trois filles Mélusine, Mélior et Palestine, s'enfuit du royaume suite à la trahison de son royal époux. C'est également à la suite d'une trahison que Mélusine se trouvera sous le joug d'une malédiction : tous les samedis, elle se transformera des pieds à la taille en serpent. Ainsi donc, lorsque Mélusine rencontre et séduit Raymondin, jeune chevalier, elle lui promet monts et merveilles à une seule et unique condition : que jamais il ne cherche à la voir ou à savoir ce qu'elle fait le samedi.
L'union se passe donc sous les meilleurs auspices pendant de très nombreuses années. Raymondin reconquiert les terres de son père avec succès, les huit fils du couple connaissent un brave destin malgré des difformités extravagantes. En parallèle de cette existence courtoise et guerrière, Mélusine construit à la vitesse grand V (on est fée ou on ne l'est pas) la ville de Lusignan - Etymologiquement parlant, Mélusine signifierait Mater Lusina, la mère de Lusignan.
Ce bon temps, vous vous en doutez cependant, n'est pas voué à durer : Tôt ou tard, Raymondin brisera son serment pour apercevoir Mélusine en sa rampante condition. Le charme est alors rompu et tout est bien qui finit mal (comme ça a tjs été le cas avant que Disney réécrive tous les contes de fées quoi)

 

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Moi, j'avoue, c'est le type d'histoires qui me séduit d'emblée. Dès qu'il est question de mythes ancestraux et de personnages magiques, je signe sans réfléchir. Un peu de mystère en prime et c'est le bonheur. C'est ainsi que commence Mélusine, en effet. Sauf que rappelez-vous, ça date pas d'hier, et la littérature médiévale souffre, à mes yeux, d'un certain nombre d'handicap qui me rasent rapidement passées les cent premières pages.
Tout d'abord, l'écriture est formatée avec X formulations toutes faites
qui, bien qu'évidentes du point de vue de l'histoire littéraire, n'en sont pas moins chiantes pour les lecteurs contemporains que nous sommes.
Ensuite, c'est long, redondant et prévisible, nom de Dieu !
Heureusement que les siècles suivants se sont mis à utiliser cet excellent outil littéraire appelé ellipse parce que punaise, là j'avais juste envie de faire défiler les pages par dizaines pour que le livre avance plus vite tellement c'était ennuyeux ! (ce que j'ai pas mal fait, soit dit en passant) Jusqu'à la période des fils, ok, c'est sympa (surtt qu'en plus, je suis mauvaise langue mais Jean d'arras utilise "un peu" l'ellipse, du coup, on passe direct de leurs naissances à l'adolescence des ainées, n'est-ce-pas génial?). Mais une fois Urien et son cadet partis en croisade contre les sarrazins, on se tape leur vie puis celles des frères suivants par le menu pendant troooooooop de pages (en gros, ça couvre les 2/3 tiers du bouquin hein) et on s'en fouuuuuuuuuuut mais graaaaaaaaaaaaaaaaave ! (Oui, je crie mon ennui de la littérature médiévale). Ca se passe toujours pareil en plus, puisqu'ils sont tous protégés par un anneau magique de Mélusine, donc on sait d'emblée qu'ils vont tous gagner, qu'ils vont tous déchirer et faire de beaux mariages (sauf celui qui devient moine et celui qui brûle le monastère évidemment), donc il n'y a aucune pointe de curiosité ou d'attente. Tout est mortellement prévisible et il n'y a rien de pire pour me tuer l'envie de lire.


Au final, vous l'aurez compris, malgré le personnage principal, ce bouquin n'a, à mes yeux, rien de féérique ni de magique. C'est juste un bon gros schéma pris en bloc dans lequel on remplit les trous en insérant des noms de personnages différents.
Alors là, évidemment, je vais me faire tuer par les médiévistes parce que je suis d'une mauvaise foi intersidérale et bien sûr que c'est autrement plus profond que l'honteux portrait que j'en brosse là. Une prof avait même réussi à me convaincre que Le roman de Guillaume de Dole de Jean Renart était un tournant dans la littérature du genre. N'empêche que, le mot de la fin sera celui-ci, avec toute la subjectivité qu'il impose : C'est atrocement chiant à lire, et on ne m'y reprendra pas de si tôt !





Classique-final-4.jpgChallenge Un classique par mois

Juin 2012







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